Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure spéciale de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, madame la rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les députés, j'ai l'honneur de vous présenter ce soir le budget de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » inscrit dans le projet de loi de finances pour l'année 2018. Ce budget est le reflet d'un parti pris et d'une priorité. Le parti pris est celui de la sincérité budgétaire, préalable indispensable à une action publique efficace et à des choix politiques clairement assumés. La priorité est l'aide à nos concitoyens les plus fragiles, expression de la solidarité nationale.
Les crédits de cette mission sont essentiellement consacrés au financement de dispositifs d'aide aux populations les plus défavorisées, les moyens de fonctionnement du ministère représentant moins de 8 % du total. Ces crédits sont répartis entre quatre programmes : le programme 304, « Inclusion sociale et protection des personnes » ; le programme 157, « Handicap et dépendance » ; le programme 137, « Égalité entre les femmes et les hommes » ; le programme 124, « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative ».
Le budget de la mission augmentera de 1,5 milliard d'euros en 2018, soit une hausse de plus de 8,7 % par rapport à 2017. Cet effort considérable est destiné pour l'essentiel aux bénéficiaires de la prime d'activité et de l'allocation aux adultes handicapés, l'AAH. Il s'ajoute, je le rappelle, à la revalorisation du minimum vieillesse prévue par le projet de loi de financement de la Sécurité sociale : 30 euros dès le 1er avril 2018, puis 35 euros le 1er janvier 2019 et à nouveau 35 euros le 1er janvier 2020, soit, au total, 100 euros de plus chaque mois.
Le budget du programme 157 « Handicap et dépendance » est porté à 11,34 milliards d'euros, soit une hausse de 6,9 % entre 2017 et 2018. Cette augmentation substantielle témoigne notamment du respect de l'engagement pris par le Président de la République de revaloriser l'AAH. Afin de lutter contre la pauvreté subie des personnes du fait de leur handicap, qui restreint l'accès au travail, le montant mensuel de l'allocation sera revalorisé de manière exceptionnelle, en deux temps : en novembre 2018, l'aide à taux plein passera à 860 euros ; à la fin de l'année 2019, l'allocation verra son montant mensuel porté à 900 euros.
Par ailleurs, ce programme contribue à l'aide à l'emploi des personnes handicapées, qu'elles travaillent en milieu ordinaire ou en milieu protégé – dans ce cas, le soutien intervient à travers la garantie de rémunération des travailleurs handicapés travaillant dans les ESAT, les établissements et services d'aide par le travail, dont le montant total s'établit à 1,34 milliard d'euros. À cet égard, le dispositif d'emploi accompagné, lancé à titre expérimental en 2017 dans douze régions, sera poursuivi en 2018. Son objectif est de faciliter l'emploi des personnes handicapées dans le milieu ordinaire par le biais d'un accompagnement médico-social et d'un soutien à l'insertion professionnelle, ainsi que d'un accompagnement de leur employeur. Ce dispositif est emblématique du virage inclusif promu par ma collègue Sophie Cluzel. Nous devons porter tous nos efforts pour soutenir les personnes handicapées dans leur quotidien et dans l'accès à l'autonomie, au coeur de la cité : inclure et non plus reléguer ; vivre ensemble et non séparément dans des mondes clos.
Concernant le programme 304, je veux évoquer en premier lieu l'augmentation de la prime d'activité. Comme vous le savez, elle constitue, pour plus de 2,5 millions de foyers aux ressources modestes, un complément de revenu important – près de 160 euros par mois en moyenne – , le montant moyen des ressources des foyers bénéficiaires étant de l'ordre de 1 050 euros. Ce dispositif concourt aussi de manière importante à ce que le travail paie, comme il est dit parfois de façon raccourcie.
Conformément aux engagements du Président de la République, la prime d'activité augmentera de 20 euros à partir du 1er octobre 2018. La hausse concernera la partie forfaitaire de la prime, de façon à rétablir une continuité logique du barème de cette prime avec le RSA, le revenu de solidarité active. Je rappelle que l'augmentation réalisée en 2018 complétera une deuxième mesure favorable au pouvoir d'achat : la suppression des cotisations salariales chômage et maladie opérée en contrepartie de la hausse de la CSG, qui se traduira par exemple, pour une personne rémunérée au SMIC, par un gain de pouvoir d'achat de 132 euros dès 2018 et de 263 euros par an lorsque la mesure sera pleinement montée en charge.
Par ailleurs, cette augmentation de la prime d'activité n'est que la première étape d'une hausse qui se poursuivra au cours des années suivantes pour porter la revalorisation de la prime d'activité à 80 euros, au niveau du SMIC. En 2018, 5,1 milliards d'euros seront ainsi consacrés à la prime d'activité, ce qui représente une augmentation de 16 % par rapport à l'année 2017. Cette augmentation prend pleinement en compte l'évolution tendancielle de la prime, et c'est là qu'intervient l'effort de sincérité puisque, comme la Cour des comptes l'avait noté, les crédits inscrits dans la loi de finances pour 2017 étaient insuffisants pour financer le dispositif. Bien sûr, cette augmentation prend également en compte la revalorisation du montant forfaitaire, pour un montant de 240 milliards d'euros en 2018.
La très forte progression des crédits s'accompagne de mesures destinées à en modérer l'impact budgétaire. Celles-ci ne remettent en cause, je le dis clairement, ni l'économie globale de la prime ni l'effet favorable des dispositions adoptées pour les bénéficiaires.
Toujours au titre du programme 304, le parti pris de la sincérité amène également le Gouvernement à proposer d'augmenter de façon très importante les crédits consacrés aux mineurs non accompagnés. Sur ce dossier important et sensible, les engagements du Président de la République et du Premier ministre sont très clairs : l'État doit faire plus et mieux pour accueillir les mineurs étrangers isolés et aider les départements dans cette mission. Le nombre de mineurs pris en charge par les conseils départementaux a augmenté de façon très importante, entraînant la saturation des dispositifs et un coût croissant pour les départements. Or, même si la protection de l'enfance relève de la compétence des départements, l'État a une responsabilité forte en la matière, au travers de sa double compétence de conduite de la politique migratoire et de protection de l'enfance exercée par l'autorité judiciaire.
En outre, compte tenu des disparités constatées entre départements, une harmonisation nationale des conditions d'évaluation de la situation des demandeurs se révèle nécessaire. C'est pourquoi le Premier ministre a lancé, conjointement avec M. Dominique Bussereau, président de l'Assemblée des départements de France, une mission d'expertise afin d'identifier des solutions opérationnelles permettant d'améliorer l'efficacité, la cohérence et la soutenabilité budgétaire de la phase d'évaluation et de mise à l'abri des mineurs non accompagnés. Dès 2018, l'engagement de l'État se traduira par un renforcement très important des moyens, qui passeront de 15 millions d'euros dans la loi de finances initiale pour 2017 à 132 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2018.
L'attention envers la situation financière des départements se traduit également par la reconduction du financement du Fonds d'appui aux politiques d'insertion, le FAPI, qui sera doté de 50 millions d'euros, comme en 2017. Ce fonds permet de soutenir les dépenses des départements en faveur des personnes les plus éloignées de l'emploi. Nous avons commencé à échanger, dans le cadre de la Conférence nationale des territoires, sur le financement des allocations individuelles de solidarité, dont le RSA. Le Premier ministre a lancé, le 20 octobre dernier, une réflexion générale sur le pilotage et le financement de ces allocations, qui sera l'occasion d'examiner l'opportunité de maintenir ce fonds au-delà de 2018.
J'en viens au programme 137. Par ses enjeux et ses objectifs, la politique des droits des femmes et de l'égalité entre les femmes et les hommes concourt à la politique d'inclusion sociale qui vise à permettre à chaque citoyenne et à chaque citoyen de participer pleinement à la vie de la société, notamment en exerçant un emploi. L'égalité entre les femmes et les hommes a été déclarée grande cause nationale pour toute la durée du quinquennat. Elle bénéficie d'un engagement fort, sur tout le territoire. Elle mobilise l'ensemble du Gouvernement, dans une approche résolument interministérielle, sur les trois champs prioritaires que sont la promotion de l'égalité professionnelle et la conciliation des temps de vie, la lutte contre toutes les formes d'agissements et de violences sexistes et sexuels, et l'exemplarité de l'État grâce à l'efficacité des politiques ministérielles et interministérielles en faveur de l'égalité.
Le total des crédits affectés aux actions retracées dans le document de politique transversale progressera par rapport à 2017, pour s'établir à près de 420 millions d'euros. À l'issue du Tour de France de l'égalité, en mars prochain, le Président de la République réunira un comité interministériel et validera un programme gouvernemental, qui sera mis en oeuvre jusqu'à la fin du quinquennat.