Malgré quelques désaccords, l'examen de ces deux textes par les deux chambres du Parlement a permis un rapprochement sur les grandes lignes que sont la reprise par la sécurité sociale de la dette sociale, que nous qualifierons donc de « dette covid-19 », et l'inscription dans la loi d'une cinquième branche, celle de l'autonomie. Après le travail réalisé en commission spéciale, l'Assemblée débat donc en nouvelle lecture de textes identiques à ceux qu'elle a adoptés il y a un mois. En somme, la question paraît entendue : les principaux points soulevés semblent arbitrés.
Le législateur, au travers du projet de loi organique, s'apprête donc à prolonger, jusqu'en 2033, une dette sociale issue de la crise de la covid-19 : 15,5 milliards d'euros de prélèvements obligatoires sur les revenus d'activité continueront, jusqu'à cette date, à être consacrés à son apurement.
Dans le même temps, des incertitudes réelles pèsent sur l'équilibre des comptes de la sécurité sociale à court et moyen termes ; le rejet, par plusieurs groupes politiques, d'une règle d'or proposée par le Sénat en est le meilleur exemple. Ségur de la santé, négociation sur la création de la cinquième branche, relance de la réforme des retraites, conséquences de la récession sur la dynamique de perception des cotisations : les incertitudes sont nombreuses. Le groupe Écologie démocratie solidarité ne peut donc que regretter que le Gouvernement se prive de ressources qui auraient pu permettre, dès 2024, de répondre à ce grand enjeu du XXIe siècle qu'est la dépendance.
Ici réside la grande contradiction de ces deux projets de loi, avec, d'une part, l'inscription dans le code de la sécurité sociale d'une cinquième branche relative à l'autonomie et, d'autre part, le renoncement aux financements qui auraient pu y être consacrés, la CRDS étant, de fait, prolongée de dix ans.
Les députés s'apprêtent donc à légiférer en faisant face à ces nombreuses incertitudes et à cette grande contradiction. Pourtant, ces questions sont cruciales et auraient mérité un débat bien plus approfondi au regard des conséquences qu'auront les deux principales dispositions. Les députés présents aujourd'hui doivent avoir conscience de ce que signifie le maintien de la CRDS, en particulier pour les petits revenus, comme ils ont conscience de la nécessité de réussir la réforme de la dépendance.
En l'absence de mesures claires et lisibles sur son financement et puisque la question fiscale semble être entendue, rien ne garantit que la promesse de progrès contenue dans ces textes puisse être suivie d'effet. Le Parlement est sommé d'attendre la conférence des financeurs et il n'est pas certain qu'il soit mieux informé lors de l'examen du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale car celle-ci n'aboutira, sauf erreur de ma part, qu'en novembre.
Vous l'aurez compris, mes chers collègues, la navette parlementaire n'a pas fait changer d'avis le groupe Écologie démocratie solidarité. Ces projets de loi font perdre à notre État providence la souplesse dont il a besoin pour s'adapter aux grands enjeux de demain et nous regrettons qu'à ce jour rien ne garantisse que la création d'une cinquième branche permettra d'améliorer effectivement le quotidien des Français en situation de fragilité.