Le moment est crucial pour notre assemblée puisque c'est de l'avenir de nos finances publiques que nous allons débattre. En tant que présidente de la commission des affaires sociales, je tiens à souligner l'importance d'un examen commun à nos deux commissions.
Les finances sociales jouent en effet un rôle tout à fait particulier dans notre pays, et ce pour plusieurs raisons. Je commencerai par un chiffre : près de 600 milliards d'euros sont affectés à la protection sociale, qui constitue donc le premier poste de dépenses publiques, loin devant les dépenses de l'État ou des collectivités territoriales. Les finances sociales sont essentielles aussi par la pluralité de leurs fonctions. Les dépenses de sécurité sociale servent bien sûr à soigner, à lutter contre la pauvreté comme à assurer le bien-être de nos concitoyens en les protégeant notamment contre les risques de la vie. Surtout, les finances sociales sont un rempart qui permet de limiter l'impact des crises en assurant la protection des personnes les plus fragiles. Comme le Premier ministre l'a indiqué dans sa déclaration de politique générale, « nous ne retrouverons pas l'unité sans une attention accrue aux plus vulnérables d'entre nous. » De ce point de vue, la création de ministères dédiés à l'autonomie et à l'insertion constitue un signal positif de la part du Gouvernement, présageant, espérons-le, de décisions budgétaires à la hauteur des enjeux.
Les choix budgétaires faits au travers des précédentes lois de financement de la sécurité sociale ont permis d'amortir les effets de la crise actuelle. Les aides au maintien de l'emploi et des compétences ainsi que l'accompagnement des entreprises au coeur de la crise via le report ou l'annulation des cotisations sociales sont autant de leviers qui ont permis de maintenir notre pays à flot.
Je voudrais insister sur la manière dont nous avons fait face collectivement à la crise sanitaire, tout d'abord en renforçant notre équipement sanitaire : 4,5 milliards d'euros sont venus augmenter le budget de l'agence Santé publique France. L'objectif national des dépenses d'assurance maladie – ONDAM – que nous serons amenés à voter sera historique puisqu'il prendra en compte les 8 milliards d'euros de dépenses supplémentaires en faveur de notre système de santé et de nos établissements médico-sociaux. Enfin, les finances sociales joueront un rôle majeur face à une crise économique et sociale d'ampleur mondiale. À ce sujet, nous ne pouvons que nous féliciter du système d'activité partielle que la France a su mettre en place rapidement et qui devrait bénéficier, à terme, à plus de 10 millions de salariés. Ce véritable amortisseur social a permis le maintien dans l'emploi de millions de nos concitoyens, garantissant ainsi la sauvegarde de notre tissu économique, indispensable à la reprise de l'activité. Aussi, ce sont plusieurs dizaines de milliards d'euros de cotisations sociales qui continueront à alimenter, à moyen et long terme, le financement de notre protection sociale.
En ce qui concerne l'avenir, je souhaiterais évoquer deux sujets devant vous.
Le premier concerne les finances sociales proprement dites. La reprise économique, avec une augmentation de 8 % du PIB prévue pour l'année prochaine, devrait entraîner un redressement des recettes de la sécurité sociale. Elle sera cependant progressive. C'est pourquoi nous veillerons avec un soin particulier, lors de l'examen en commission des prochains projets de loi de financement de la sécurité sociale, à l'équilibre délicat entre dépenses et recettes que suppose une trajectoire de retour à l'équilibre. Il est important de rappeler que nous étions très proches de cet équilibre en 2019.
Le second sujet est celui du soutien aux salariés. Je tiens à saluer le pragmatisme avec lequel le Gouvernement a mis en place un dispositif d'activité partielle de longue durée, qui constitue une réponse pertinente et adaptée. Face à l'augmentation historique du chômage, ce dispositif pourra s'allier à d'autres mesures du troisième projet de loi de finances rectificative, en faveur tant des apprentis que des étudiants, car l'emploi des jeunes fait également partie des objectifs dans la réalisation desquels les finances sociales auront évidemment un rôle à jouer. De façon globale, la perte de cotisations entraînera mécaniquement une hausse du taux de chômage. Nous devons tout faire pour que cela ne réduise pas les moyens consacrés à notre système de santé ou à la prise en charge de l'autonomie, la cinquième branche de la sécurité sociale dont nous voterons la création aujourd'hui.
Vous l'aurez compris : sauver l'emploi, c'est aussi sauver notre modèle de protection sociale qui repose encore largement sur le travail. Des choix cruciaux attendent notre commission lors de l'examen des prochains textes financiers. Le débat que nous avons aujourd'hui est l'occasion de mesurer ces enjeux, au mitan d'une année budgétaire comme nous n'en avions jamais connue auparavant.
Le plan de relance économique annoncé ces derniers jours par le Président de la République et les accords obtenus au niveau européen auront également un impact positif sur la sphère économique et sociale de notre pays.