Intervention de Boris Vallaud

Réunion du mardi 7 novembre 2017 à 16h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBoris Vallaud :

Un petit regret, pour commencer : nous vous avions écrit, le 1er août dernier, pour demander que les groupes parlementaires soient entendus. Vous aviez donné votre accord de principe en séance, mais cela ne s'est pas traduit dans les actes.

Vous ne vous étonnerez pas que le groupe Nouvelle Gauche exprime à nouveau ses désaccords, ses inquiétudes, ses déceptions : nos désaccords demeurent, nos inquiétudes se réalisent et notre déception se confirme. Cette réforme passe à côté de l'essentiel : ce n'est pas une révolution copernicienne, mais tout au plus un élément supplémentaire d'une politique économique libérale qui accroîtra encore les inégalités. Après trente années où nous avons eu à arbitrer entre inflation et chômage, vous nous demandez désormais d'arbitrer entre chômage et mini-jobs. Vous y voyez un progrès, alors que c'est pour nous un renoncement tragique et coupable.

Si vous me permettez cet emprunt, ce projet est un peu feignant. Il n'affronte pas les grands sujets dans un pays qui compte déjà un certain nombre de mini-jobs : nous avons un tiers des contrats à durée déterminée de moins d'un mois de toute l'Europe. Vous n'affrontez pas les questions de la qualité de l'emploi, de la pauvreté au travail et des inégalités. Vous en prenez acte et même vous les encouragez avec les CDI de chantier, la facilitation des licenciements et les ruptures conventionnelles collectives.

Vous manquez aussi le rendez-vous du dialogue social. Vous nous aviez demandé de vous faire confiance sur ce plan-là mais, de l'avis unanime des organisations syndicales, vous avez en réalité fait droit à la conception la plus rétrograde en la matière. On croirait entendre M. Gattaz proclamant faire du dialogue social lorsqu'il parle à l'un de ses employés. Il n'y a rien sur la codécision, en dépit des amendements que nous avions déposés.

Vous avez également évité d'affronter le sujet majeur de la révolution numérique, qui n'a donné à voir qu'une part d'elle-même jusqu'à présent. La semaine où vous présentiez ces ordonnances, il y avait des manifestations de livreurs de Deliveroo, mais votre projet ne consacre pas une ligne à ces questions.

Nous avons donc eu raison de ne pas vous faire confiance, madame la ministre. Vous prenez acte d'un pays durablement coupé en deux et vous n'avez pas écouté votre opposition – ou en tout cas son aile gauche.

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