À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles. Pour faire face à une crise sanitaire sans précédent, le Gouvernement a dû mettre en oeuvre des dispositifs inédits, y compris par leur ampleur, afin d'amortir le choc de la crise sanitaire pour l'économie française. Le décrochage des finances publiques donne le vertige : la dette passe à 121 % du PIB ; la dépense publique augmente de plus de 6 % pour atteindre 63,6 % du PIB ; le déficit public est désormais attendu à 11,4 % du PIB.
Notre accord s'arrête cependant à ces constats, car les deux documents qui éclairent ce débat parlementaire, le rapport préparatoire au débat d'orientation des finances publiques, élaboré par le Gouvernement, et le rapport de la Cour des comptes de juin 2020 relatif à la situation et aux perspectives des finances publiques, aboutissent à des conclusions bien différentes.
Pour le Gouvernement, tout va bien, madame la marquise ! Tout a été parfaitement géré. Il s'accorde un satisfecit indécent sur la situation des finances publiques et sur la gestion de la crise, et se montre optimiste pour les mois à venir. ll est dans son rôle et je suis dans le mien en apportant quelques nuances à cette carte postale idyllique.
Le Gouvernement estime que la France est entrée bien préparée dans la crise sanitaire – bien que celle-ci ait considérablement dégradé les comptes publics – grâce à la gestion rigoureuse et sincère qui a précédé et qui a permis, selon lui, une réaction immédiate.
Il nous dit que la croissance française a été de 1,5 % en 2019, portée par la demande intérieure mais limitée par la balance commerciale, bien loin des prévisions initiales.
Il précise que le pouvoir d'achat des ménages a lui aussi progressé, de 2,1 %, ce qui s'est traduit par une hausse de la consommation. Le ressenti de nos concitoyens est tout autre, croyez-moi !
Il se satisfait de ses résultats en matière de déficit en soulignant que celui-ci est resté identique en 2018 et en 2019 – ce qui démontre pourtant qu'aucun effort structurel n'a été consenti : la dette est stabilisée, mais son remboursement n'a pas commencé.
Il souligne que la dépense publique a atteint 53,7 % du PIB en 2019, mais il omet de dire que son rythme de progression a été de 1,8 % en 2019.
Ce double discours est confirmé par la Cour des comptes, qui se montre bien évidemment plus objective et plus sévère sur la situation. Elle regrette, en effet, un redressement largement inachevé des comptes publics en 2019 et soutient, à la différence du Gouvernement, que « la France n'a pas abordé cette crise avec des finances publiques restaurées » :