Cette révision des lois bioéthiques, qui ne se résume pas à la PMA, tant s'en faut, prétend répondre aux progrès de la science et aux évolutions de notre société. Mais il faut nous interroger : la science évolue, mais est-ce toujours un progrès ? Le techniquement possible est-il toujours humainement souhaitable ? Ne peut-on craindre les effets de l'intelligence artificielle, de la médecine prédictive, de la neuromodulation ? Ne va-t-on pas vers l'homme augmenté ? La génomique, le séquençage, le ciseau moléculaire CRISPR-Cas 9, et même aujourd'hui CRISPR-Cas 13, nous conduisent-ils vers plus d'éthique ?
L'élargissement de l'accès à la PMA va créer des problèmes de ressources, à commencer par les ressources budgétaires avec l'accès au remboursement de la sécurité sociale, actuellement conditionné à un critère thérapeutique. Est-ce à l'assurance maladie de financer la création d'orphelins de père, d'orphelins d'un deuxième parent ? La grande majorité des Français ne le souhaite pas. Mesure-t-on d'ailleurs les effets à venir sur la relation au médecin, ainsi détourné de sa mission de soigner ?
Il posera aussi un problème de ressources biologiques, car nous allons nous heurter au manque de gamètes, surtout avec la levée programmée de l'anonymat. Comment allez-vous gérer cette pénurie ? En important des gamètes de pays où les dons sont rémunérés ? L'élargissement de la PMA va générer des tensions, affaiblissant le respect du principe de gratuité, et conduire inéluctablement à une dérive marchande.
Aujourd'hui, 96 % des PMA se font avec les gamètes du couple, sans problème majeur. L'assistance médicale à la procréation avec tiers donneur est donc très largement minoritaire. Or elle pose des questions éthiques persistantes puisqu'elle provoque notamment le mal-être des enfants souhaitant accéder à leurs origines. Ce projet tente d'y parer en prévoyant la levée programmée de l'anonymat à la majorité de la personne issue du don. L'élargissement sans limites de la PMA avec donneur aura les conséquences que l'on sait : absence de lien biologique, défaut de parentèle, absence de filiation paternelle ou pénurie de gamètes.
La réflexion éthique semble biaisée. On sème volontairement la confusion entre des réalités objectives disparates : le slogan de la PMA pour toutes tend à masquer la réalité d'une nouvelle PMA, bien différente de celle qui se pratique actuellement. Votre souci de répondre au désir de femmes très minoritaires d'accéder à la PMA sans père justifie-t-il de supprimer le critère thérapeutique de la PMA actuelle, le consentement du conjoint du donneur ou la condition d'un lien biologique avec au moins un des parents ? En réalité, vous modifiez aussi la donne pour les couples hétérosexuels, leur rendant plus difficile demain l'accès à la PMA avec tiers donneur.