L'assistance médicale à la procréation consiste en des actes qui ne sont pas anodins à vivre et qui s'avèrent souvent infructueux. On peut comprendre qu'on veuille garantir les meilleures conditions de réussite. Il faut cependant se garder de la tentation d'une sorte de sélection qui ne serait pas sans signification problématique pour le genre humain, bien au-delà de la PMA elle-même. Dans le monde du transhumanisme, certains poussent des logiques d'artificialisation de la procréation, dont le sens et les effets seraient problématiques du point de vue éthique. Il convient d'en rester à une assistance, sans quoi nous prendrions trop de champ avec une certaine idée du genre humain. Même si la personne humaine n'est pas réductible à un corps, elle naît de la chair et c'est aussi un fait civilisant. Une autre perspective serait par nature déshumanisante.
Ces perspectives, dont certaines sont tentantes à l'échelle d'une vie, d'une personne, nous renvoient à des interrogations profondes, prises à l'échelle de la société. Notre condition humaine, comment l'ignorer en ces temps difficiles, est soumise à des aléas qui nous échappent et lorsqu'un enfant naît, nul ne peut lui garantir qu'il sera épargné par la maladie. Nombre de femmes et d'hommes vivent d'ailleurs avec des maladies, que nous devons combattre sans nous renier, et connaissent malgré tout le bonheur d'être et de vibrer avec d'autres.
Nous sommes tous et toutes différents, avec nos forces et nos fragilités, avec l'incertitude intrinsèque de notre trajectoire personnelle. Donner naissance, même si cela ne se passe pas toujours ainsi, c'est s'engager, c'est prendre le risque pour celui, celle qui vient, c'est accepter cette incertitude en souhaitant pourtant le meilleur. Là encore, avec les choix qui nous occupent, il nous faut mesurer ce que l'on gagne, ce à quoi l'on touche et ce que l'on risque.
Une réflexion approfondie doit être conduite sur l'humain augmenté tel qu'il peut s'imaginer dans des laboratoires. Agir pour le meilleur devenir humain, ce n'est pas s'affranchir de ce que nous sommes. Nous devons pousser plus loin les questions de fond, les questions de sens, tenir à distance la tentation illusoire et destructrice de la toute-puissance, pour viser le soin, l'accompagnement, l'humain dans ses fragilités et sa plénitude. Nous avons vu dans la période de crise sanitaire combien c'était dans la relation aux autres que se comblaient les manques ou s'apaisaient les blessures issues de la condition humaine. Nous prenons chaque jour conscience de la finitude de la terre, et il faut accepter sans doute aussi nos propres limites. Ce qu'il faut donc rechercher, c'est une éthique du bonheur partagé, qui ne se trouve pas seulement dans la technique, dans l'opulence de quelques-uns, dans le marché débridé. C'est pourquoi il faut agir avec autant de vigueur pour l'humain que pour la planète.