Intervention de Michel Castellani

Séance en hémicycle du jeudi 23 juillet 2020 à 15h00
Règlement du budget et approbation des comptes de l'année 2019 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Castellani :

Nous abordons la lecture définitive du projet de loi de règlement, qui décrit une situation bien éloignée de ce que nous vivons. La crise sanitaire et son pendant économique, ainsi que le choc sévère subi par nos finances publiques, qui en découle, doivent nous amener à exercer un contrôle d'autant plus exigeant sur les dépenses de l'année 2019.

Premier point, et plusieurs d'entre nous l'ont reconnu, le processus de sincérisation budgétaire s'est poursuivi en 2019, aboutissant à une exécution plus saine. Alors que les exercices précédents avaient connu deux, voire trois décrets d'avance, aucun n'a été nécessaire en cours d'année dernière.

Pour autant, comme mon collègue Charles de Courson l'avait indiqué en première lecture, le budget 2019 marque une rupture du pacte républicain instauré par la loi Veil de 1994, du fait de la non-compensation des mesures d'urgence pour les recettes de la sécurité sociale, au détriment des assurés sociaux. À cet égard, nous regrettons le rejet de l'amendement que nous avions déposé sur le troisième projet de loi de finances rectificative. Ce choix, qui met la sécurité sociale sous tension alors qu'elle était quasiment revenue à l'équilibre, reste d'autant plus injustifiable aujourd'hui que les comptes sociaux ont été fortement mobilisés pour répondre à la crise. Nous y voyons une forme de déresponsabilisation de l'État. À l'appui de ce constat, vous enjoignez aux collectivités territoriales, et plus particulièrement aux départements, de faire des efforts sans leur allouer les moyens suffisants pour mener leur action.

Deuxième point, la Cour des comptes considère, au vu des résultats des finances publiques pour 2019, que le redressement est inachevé. Ce constat est aisé à comprendre : malgré une croissance économique relativement solide, de 1,5 %, le déficit public a été de 3 %, contre 2,3 % en 2018, connaissant sa première détérioration depuis la crise financière de 2009. Par ailleurs, le déficit pour le seul budget de l'État atteint quasiment 100 milliards d'euros.

Plutôt que de profiter de la conjoncture favorable, désormais perdue, afin de retrouver des marges de manoeuvre budgétaires, le Gouvernement a différé le redressement structurel des comptes publics, ce que nous ne pouvons que regretter. La loi de finances initiale pour 2019 prévoyait déjà un effort structurel réduit à 0,1 point. Or, depuis la publication des comptes nationaux annuels par l'INSEE, l'Institut national de la statistique et des études économiques, et l'avis du Haut conseil des finances publiques sur le troisième budget rectificatif, nous avons appris qu'il n'y a finalement eu aucun effort structurel en 2019.

Comment en sommes-nous arrivés là ? La dépense publique a augmenté de 1,8 %, soit trois fois plus que l'objectif initial, fixé à 0,6 %. Les mesures d'urgence consécutives au mouvement des gilets jaunes ont eu pour effet d'abaisser le niveau des recettes fiscales. Les prélèvements obligatoires ont ainsi diminué de 10 milliards d'euros, alors que les économies atteignaient à peine 5 milliards pour l'ensemble du secteur public.

Pour ce qui est du respect des règles budgétaires européennes, le constat n'est guère plus réjouissant : le précédent gouvernement a réussi l'exploit de dépasser la déviation maximale autorisée sur un an pour chacune des trois règles. Il y a maintenant près de trois ans, le Gouvernement promettait de ramener le poids de la dépense publique dans la moyenne de la zone euro. En 2019, cet écart était de 8,2 points. Dans son avis, le Haut conseil des finances publiques note d'ailleurs que l'amélioration du solde structurel est imputable à des facteurs qui ne résultent pas de l'action des pouvoirs publics, tels que la diminution de la charge des intérêts de la dette.

Pas de marges de manoeuvre : voilà le constat que l'on peut tirer de l'exécution budgétaire de 2019. Certes, en dégager eût été difficile et impopulaire et exigé une forte volonté politique, mais force est aujourd'hui de constater que nous payons le prix d'une politique consistant à toujours repousser les efforts.

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