Intervention de Claudia Rouaux

Séance en hémicycle du jeudi 23 juillet 2020 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2020 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaudia Rouaux :

Alors que nous ne sommes qu'en juillet, nous nous apprêtons à adopter définitivement le troisième projet de loi de finances rectificative pour 2020. Comme l'avait fort justement fait remarquer ma collègue Christine Pires Beaune en première lecture, cette situation inédite prouve que nous traversons une crise sans précédent dans notre histoire moderne.

Le groupe Socialistes et apparentés ne peut cacher sa déception à l'issue du parcours législatif du PLFR 3. Quelle vision portez-vous en défendant ce texte ? Difficile d'y répondre ! Ce collectif budgétaire est constitué avant tout de mesures relevant de plans de soutien sectoriels, sans lien entre elles ou prolongeant des dispositifs d'urgence mis en place au début de la crise sanitaire. Vous me répondrez que cette vision s'exprimera dans le plan de relance qui sera décliné dans le PLF pour 2021. Permettez-moi de vous rétorquer que réduire les impôts de production ou annoncer un énième programme de rénovation thermique des bâtiments ne constitue en rien une vision pour la France de demain.

Plutôt que de diminuer les impôts de production de 20 milliards d'euros et de réduire une nouvelle fois les recettes des collectivités territoriales, aidez ces dernières à être en mesure d'investir. Elles sont les premiers investisseurs publics de France. Or, si le PLFR 3 comporte des mesures de soutien allant dans le bon sens, force est de constater que celles-ci restent insuffisantes. Ainsi, les collectivités, en premier lieu les communes et les EPCI – les établissements publics de coopération intercommunale – , ne bénéficieront d'aucune compensation de l'État pour leurs pertes de recettes tarifaires. De leur côté, les départements devront rembourser leurs avances de DMTO, alors même que l'hypothèse d'un rebond du marché immobilier est incertaine.

Quant aux régions, ce sont les grandes oubliées du PLFR 3. Leurs compétences sont pourtant centrales pour la relance, en matière de développement économique, d'aménagement du territoire et de formation. J'observe d'ailleurs que, dans le rapport préparatoire au débat d'orientation des finances publiques, le Gouvernement mentionnait un éventuel dispositif de soutien aux régions : il y est en effet indiqué, page 19, qu'un amendement au PLFR 3 aurait dû être présenté en vue de compenser aux régions les pertes de recettes en matière de TVA et de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques – TICPE – , à hauteur de 700 millions d'euros. Or je constate que vous n'avez malheureusement pas présenté ce dispositif de compensation, que nous aurions soutenu sans réserve.

Nous sommes favorables à la rénovation thermique des bâtiments, mais il faut être ambitieux : fixons un cap pour faire disparaître, dans les prochaines années, les 7,5 millions de passoires thermiques que compte la France. Les députés du groupe Socialistes et apparentés ont une proposition travaillée, chiffrée, argumentée : la prime pour le climat, défendue par mes collègues Boris Vallaud et Jean-Louis Bricout. Pour l'instant, vous nous avez adressé une fin de non-recevoir.

De même en ce qui concerne le PLFR 3 : vous avez balayé toutes les propositions que nous avons faites à l'Assemblée nationale, et les avancées obtenues par les sénateurs socialistes, qui concernaient notamment les outre-mer, ont été supprimées par la CMP. La plupart de nos propositions visaient à mettre en oeuvre notre plan pour un rebond économique, social et écologique. Je vous invite à lire ce plan, crédible et financé.

Votre absence de considération pour les propositions de l'opposition pose un problème démocratique et affaiblit le Parlement. Je note du reste que toutes les oppositions ne sont pas traitées de la même manière : l'opposition de droite, dont sont issus les deux Premiers ministres de ce quinquennat, est un peu mieux traitée que l'opposition de gauche – ce qui a notamment permis l'aboutissement de la CMP. Vu votre politique, cette différence de traitement ne surprendra personne.

Puisque les conséquences de la crise sanitaire imposent des mesures d'urgence, nous ne voterons pas contre le PLFR 3, mais nous ne voterons pas non plus pour ce texte incomplet et sans vision.

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