Intervention de Michel Castellani

Séance en hémicycle du jeudi 23 juillet 2020 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2020 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Castellani :

La crise est là, d'une ampleur inédite, avec des répercussions budgétaires, économiques et sociales. Il importe, plus que jamais, que la puissance publique soit présente aux côtés des entreprises et de nos concitoyens les plus fragilisés.

Les derniers développements conjoncturels suggèrent que cette récession pourrait être un peu moins forte que prévu – on attendait une chute du PIB de 11 %. Néanmoins, les incertitudes actuelles appellent à la prudence.

Selon nous, la réponse à cette crise devrait s'échelonner en trois temps : celui de l'urgence, celui du soutien et celui de la relance.

Ce troisième projet de loi de finances rectificative en quatre mois vise d'abord à amplifier la réponse globale à l'urgence. Je pense à l'abondement supplémentaire du fonds de solidarité ou au dispositif de soutien à l'activité partielle. Eu égard au coût élevé de ce dernier pour les finances publiques – 31 milliards d'euros au total – , nous réitérons notre demande d'une intensification des contrôles a posteriori.

Ce collectif budgétaire apporte ensuite un soutien aux secteurs les plus touchés : le tourisme, l'hôtellerie, la restauration, le sport, la culture, les arts et spectacles. Nous avons été entendus s'agissant des exonérations exceptionnelles de cotisations pour ces secteurs, à hauteur de 3 milliards d'euros, et nous en sommes satisfaits. Néanmoins, nous regrettons que, malgré quelques avancées, le mécanisme retenu soit complexe et incomplet. Il eût été préférable et plus clair d'ouvrir le dispositif à l'ensemble des entreprises qui connaissent une baisse de leur chiffre d'affaires en 2020.

Je veux saluer aussi, bien sûr, la prolongation jusqu'au 31 décembre 2023 du crédit d'impôt pour investissement en Corse, même si son élargissement n'a pas été conservé par la commission mixte paritaire. Dieu sait que nous nous sommes mobilisés en faveur de ce crédit d'impôt, dispositif essentiel pour la création et la vitalité des entreprises en Corse.

Ce collectif budgétaire était également attendu pour améliorer la situation des collectivités territoriales, dont les recettes pâtissent de la crise. Nous saluons les améliorations apportées par le Sénat et, pour une grande part, conservées par la CMP – je pense en particulier à la clause de retour à bonne fortune s'agissant des avances de DMTO. Il n'en reste pas moins que les collectivités doivent faire face à de nouvelles charges et que les propositions du Gouvernement n'y répondent que partiellement, notamment pour ce qui concerne les départements, lesquels vont connaître une forte hausse de leurs dépenses de solidarité. Nous regrettons également que les régions aient été oubliées : elles ne bénéficient d'aucune mesure dans ce PLFR, alors que nous devrions les accompagner à la hauteur de ce qu'a été et continue d'être leur engagement. Tous échelons confondus, les pertes pour les collectivités territoriales sont estimées à 7,5 milliards d'euros. Face à cela, le Gouvernement prévoit seulement 4,5 milliards d'euros d'augmentation de la DSIL, avances remboursables comprises. On voit bien qu'il y a un déséquilibre. Les collectivités représentent pourtant la majorité de l'investissement public, il est toujours utile de le rappeler.

Quant à la relance, elle est présente dans le texte, mais seulement pour ce qui concerne certains secteurs, comme l'automobile et l'aéronautique. Nous avions regretté que ce PLFR n'inclue pas un grand plan de relance global. Nous avons appris, depuis lors, qu'il serait intégré dans le budget pour 2021. Son montant global est connu : autour de 100 milliards d'euros. On sait aussi qu'il reposera, à hauteur de 40 milliards d'euros, sur le plan de relance européen, dont nous saluons une fois de plus la conclusion.

Prenons garde, néanmoins, que le plan de relance ne se transforme pas en plan de retard. Les défaillances d'entreprises vont se multiplier, hélas, et bien avant le début de l'année 2021. La récession sera d'autant plus forte que nous tarderons à mettre en oeuvre une relance devant concilier l'ambition économique et l'impératif écologique.

Nous regrettons ainsi que les avancées obtenues au Sénat en vue d'accélérer la rénovation énergétique des habitations n'aient pas été conservées dans le texte final. C'eût été un signal fort à destination d'un secteur d'avenir fortement affecté.

En résumé, nous prenons acte du compromis trouvé avec le Sénat, qui apporte des avancées pour les territoires et des réponses, quoique imparfaites, à certains secteurs particulièrement touchés. Nous regrettons cependant que le volet social soit si faible, alors que se creusent les inégalités, et que la relance et le virage écologique tant de fois annoncé tardent à se concrétiser. C'est pourquoi les députés du groupe Libertés et territoires, dans leur immense majorité, s'abstiendront.

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