La mission « Médias, livres et industries culturelles » qui nous est présentée aujourd'hui est malheureusement incomplète, car la totalité des aides que l'État fournit à la presse n'y figure pas. Qu'en est-il des aides indirectes ou des taux de TVA super réduits ? Ils sont passés sous silence, jetés aux oubliettes des comptes publics. Les quelque 285 millions alloués au programme « Presse et médias » cachent très mal les 2,5 milliards d'euros d'aides directes et indirectes – en se basant sur une TVA normale à 20 % au lieu du taux super réduit de 2,1 % – qu'alloue généreusement l'État chaque année.
Avec un chiffre d'affaires de 7,8 milliards d'euros par an – je le redis, car ce chiffre est important – , la presse écrite est donc littéralement sous perfusion. Faites les comptes : 2,5 milliards d'aide pour 7,8 milliards de chiffre d'affaires. Quelle générosité ! On pourrait donc dire qu'un journaliste de presse écrite coûte 10 000 euros par an aux Français, toutes aides confondues. Ces aides de l'État, ces subventions étatiques font-elles bon ménage avec l'indépendance, l'impartialité et la liberté de la presse ? On est en droit d'en douter.
Ces accointances, ces connivences entre le monde de la presse et les sphères étatiques participent au désamour des Français à l'égard de leurs médias et, en retour, à leur curiosité pour cette presse alternative que l'on trouve sur internet et qui n'est pas synonyme de désinformation comme certains, parmi nos prétendus grands esprits, voudraient le faire croire. Supprimer les subventions directes et indirectes à la presse, ce serait un pari sur le talent des journalistes, sur leur goût pour la liberté et les risques qu'elle comporte. Ce serait changer les règles d'un jeu dont les médias sortent toujours perdants. Ce serait oser la liberté et donner aux Français l'occasion de croire à nouveau en elle et en son indépendance.