Intervention de Nicolas Meizonnet

Séance en hémicycle du lundi 28 septembre 2020 à 16h00
Accélération et simplification de l'action publique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Meizonnet :

La simplification de l'action publique ne peut être que souhaitée par les usagers comme par les agents des administrations, tant notre pays est réputé pour son administration pléthorique et tatillonne. Si ce texte propose incontestablement des améliorations dans le fonctionnement de nos services publics, il faut s'assurer que cela ne soit pas au détriment des citoyens qui sont, rappelons-le, ceux que les élus et les services publics doivent servir. Or certains éléments de ce projet de loi méritent d'être encore sérieusement discutés, et j'espère amendés, si l'on veut remettre le service au coeur du sujet et éviter qu'une simplification mal appliquée n'ouvre pas la porte à de l'opacité ou, pire, à des risques de corruption.

Si l'on prend l'exemple de la commande publique, que ce texte veut réformer, on peut légitimement se demander si toutes les mesures proposées sont bénéfiques. Les dispositifs permettant de passer des marchés sans publicité, par exemple, risquent d'exclure de facto les TPE et PME qui n'ont pas les moyens d'obtenir les informations nécessaires pour postuler.

De la même façon, l'introduction du critère de l'intérêt général dans le mécanisme de la commande publique ouvre une porte à l'opacité, puisque la commande publique doit par définition servir l'intérêt général. Sans entrer dans des détails que vous connaissez, on peut craindre que la réforme mène à moins de concurrence, moins d'appels d'offres et toujours plus de possibilité de renouveler implicitement les contrats, notamment les très sensibles contrats de concession.

Passons maintenant au sujet des éoliennes, cette aberration prétendument écologique dont les Français ne veulent pas ! Je ne vous cache pas que je suis inquiet : quelle place ce texte laissera-t-il aux préoccupations légitimes des habitants ? Pourquoi en effet supprimer l'avis préalable de la commission départementale consultative, compétente pour les projets d'implantation d'éoliennes ? Pourquoi restreindre en outre l'obligation d'enquête publique ?

J'insiste : les Français sont majoritairement opposés à l'implantation de nouvelles éoliennes, qui ne présentent pas les vertus prêtées abusivement à cette source d'énergie, qui provoquent des dommages multiples au détriment de la faune, soulèvent des interrogations sérieuses en matière de santé publique, engendrent un bétonnage massif des sols et détériorent nos paysages. Les éoliennes défigurent notre patrimoine bâti et naturel, et l'on devrait désormais se passer de l'avis des riverains pour en construire ? Je doute que ce genre de simplification soit acceptable.

Parmi les autres risques que je vois poindre figurent enfin ceux de la réforme de l'ONF. Pour mettre l'Office en phase avec l'environnement économique, l'exécutif voulait en modifier la gouvernance, au risque de faire sauter les garanties d'une gestion durable de la forêt, et faire plus de place aux agents de droit privé. Il a heureusement renoncé au premier projet, mais maintenu le second. Le recrutement d'agents de droit privé risque d'affaiblir le niveau de protection des massifs forestiers, le statut de fonctionnaire étant sans nul doute le plus adapté pour assurer à l'ONF des pouvoirs de police et lui permettre de faire appliquer la loi.

Je veux enfin souligner l'avancée la plus emblématique de ce texte, tant les règles qu'elle tend à modifier sont absurdes : celle relative au respect du droit de propriété. Ras le bol des squatteurs ! Rappelons que le droit de propriété est un principe constitutionnel, « naturel et imprescriptible » selon l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme, au même titre que le principe de liberté. Les squats qui font régulièrement la une de l'actualité, depuis des années, démontrent clairement que les textes en vigueur sont insuffisants. Je le répète, notre rôle d'élus est de protéger les citoyens, dans leurs droits et dans leurs biens. Monsieur le rapporteur, vous avez introduit dans ce texte des améliorations significatives pour permettre que la loi soit appliquée promptement : il faut désormais aller plus loin. Il faut que les squatteurs soient réellement et – j'insiste sur ce point – rapidement sanctionnés.

Mes chers collègues, ce texte, malgré ses manques, apportera aux Français des avantages certains. Toutefois nous devrions commencer par nous appliquer à nous-mêmes ce principe de simplification en évitant autant que possible toute inflation législative.

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