Intervention de Agnès Pannier-Runacher

Séance en hémicycle du vendredi 2 octobre 2020 à 15h00
Accélération et simplification de l'action publique — Article 42 bis

Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée chargée de l'industrie :

En cohérence avec la position défendue par le Gouvernement en commission spéciale, mon avis est différent de celui de M. le rapporteur, pour plusieurs raisons.

Premièrement, comparaison n'est pas raison : une assurance emprunteur n'est pas un abonnement téléphonique, ni même une assurance habitation. C'est un contrat que l'on signe pour la durée du prêt – dix, quinze, vingt ou vingt-cinq ans – quand un forfait mobile est souscrit pour vingt-quatre mois au plus. Sur la durée du prêt, la date anniversaire revient avec une récurrence élevée, qui équivaut peu ou prou à une échéance mensuelle pour un abonnement téléphonique. L'assurance emprunteur n'est pas un service que l'on active tous les jours.

Deuxièmement, l'assuré peut déjà résilier le contrat à tout moment au cours de la première année. Conscient des risques auxquels il est exposé, il peut s'apercevoir qu'il n'a peut-être pas souscrit la bonne assurance. Ensuite, il conserve la possibilité de résilier son assurance emprunteur chaque année.

Troisièmement, il y a selon moi un problème de méthode : si nous ne tenons pas compte de leurs avis, les instances consultatives pourront nous reprocher, à raison, de ne pas jouer le jeu de la concertation et de la coconstruction avec les professionnels et les parties prenantes. Au sein du CCSF sont représentés non seulement les établissements bancaires, mais aussi les consommateurs. Il importe de laisser toute sa place à la concertation.

Quatrièmement, à force de resserrer ainsi la pression, on peut craindre que les mauvais risques ne soient plus assurés convenablement. Les fintech de l'assurance se mettront en chasse des « bons risques », à savoir des personnes jeunes en bonne santé. Quant aux « mauvais risques », on ne leur proposera pas ces offres, ce qui créera, à l'évidence, un déséquilibre. La péréquation entre « bons risques » et « mauvais risques », mécanisme naturel dans une assurance, ne se fera plus.

Si les banques en sont réduites à traiter uniquement les « mauvais risques », elles augmenteront le coût de l'assurance emprunteur. Le dispositif adopté en commission spéciale pourrait donc avoir, in fine, un effet pervers : les personnes les plus vulnérables paieraient plus, tandis que les personnes en bonne santé qui ont la vie devant elles et ont un bon emploi paieraient moins. Je ne suis pas sûre que ce soit là la solidarité à laquelle nous aspirons, les uns et les autres, sur ces bancs.

Enfin, le Sénat avait beaucoup travaillé sur la question en amont. La rédaction qu'il a retenue correspond à celle de la proposition de loi de M. Bourquin, qu'il avait adoptée à l'unanimité, ce dont il faut aussi tenir compte.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.