Non, cher collègue, j'ai vérifié les chiffres depuis la discussion en commission. Vous alourdissez ainsi vos pertes fiscales déjà massives, sachant que, sur les 250 milliards de déficit annoncé pour fin 2020, 135 milliards sont déjà liés aux pertes de recettes. Cet argent sera en outre réparti de manière totalement inégale entre les entreprises, un quart allant aux 250 plus grosses entreprises, quand les 285 000 plus petites se partageront royalement 125 euros chacune.
Vous allez enfin continuer à distribuer de l'argent sans condition, comme vous l'avez fait lors du premier PLFR, servant ainsi toutes ces entreprises qui, aujourd'hui, annoncent des plans sociaux, non pas à cause de la covid mais en raison de restructurations boursières : Nokia, Bridgestone… la liste est malheureusement en train de s'allonger.
J'en conclus que le CICE ne vous a pas servi de leçon, que vous continuez, pour reprendre la réponse que m'avait faite ici même Bruno Le Maire, à compter sur le bon sens des chefs d'entreprise, y compris ceux dont le seul critère de référence est le rendement de la rente capitaliste. Comment, au moins, n'avoir pas subordonné votre engagement à cette seule condition de bon sens : pas d'argent public pour les entreprises qui licencient tout en faisant des bénéfices !
Emmanuel Macron comme Bruno Le Maire plaidaient, pendant le confinement, pour la relocalisation de nos entreprises. Fort bien, mais que faites-vous pour cela ? Aucune réforme structurelle n'est envisagée, alors que l'Union européenne organise un libre-échange interne qui permet à Bridgestone de toucher de l'argent pour ouvrir une autre entreprise en Pologne, comme l'a révélé Fabien Roussel.
Plutôt qu'une taxation aux frontières, vous préférez miser sur la compétitivité pour attirer les entreprises, ce qui se traduit par des baisses d'impôts, un moins disant fiscal et social dont nous n'avons rien à tirer. La réponse de Bridgestone, ou celle de Sanofi, qui touche le CICE tout en supprimant des postes de chercheur en France, ne vous alerte-t-elle pas ? Bref, cette politique de l'offre nous a déjà beaucoup coûté.
En matière de politique de la demande, le compte n'y est pas. Vous auriez au moins pu faire un geste en faveur des plus pauvres des Français, dont le nombre a explosé au point que le Secours populaire considère que la situation n'a jamais été aussi grave depuis la Seconde Guerre mondiale.