Intervention de Christophe Naegelen

Séance en hémicycle du lundi 12 octobre 2020 à 16h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Naegelen :

Le projet de loi de finances pour 2021 n'est pas un budget comme les autres : c'est un budget de crise. Nous traversons en effet une crise sanitaire, économique et sociale. Mais ce budget doit aussi être un budget de défi pour que, demain, nous puissions sortir de cette crise par le haut.

La crise sanitaire du coronavirus a engendré une crise économique majeure, entraînant une baisse du PIB que nous estimons à quelque 10 % pour 2020. La consommation des ménages reculerait de près de 8 % et l'investissement des entreprises de près de 24 %. Cette crise conduit donc à une baisse des recettes de l'État, des entreprises, ainsi que des collectivités locales. Aucun acteur économique n'est épargné. Cette crise sanitaire persiste encore alors qu'aucun scénario de deuxième vague n'est mentionné dans ce budget. Le déficit public va s'envoler à 227 milliards d'euros, ce qui représente environ 10 % du PIB, et atteindra encore 161 milliards l'année prochaine, en dépit d'un rebond prévu de la croissance d'environ 8 %. Quant à la dette, elle bondira à 2 620 milliards en 2020 et 2 800 milliards en 2021. Néanmoins, l'État se finance beaucoup plus avantageusement que lors de la crise financière, grâce aux taux négatifs issus de la politique monétaire très accommodante de la Banque centrale européenne – mais jusque quand cela va-t-il durer ?

Le PLF a pour objectif d'accompagner le plan France relance, afin de redresser l'économie à l'horizon de 2030. Il n'en reste pas moins que la dette publique s'élève aujourd'hui à un niveau alarmant, pour ne pas dire historique, à 117,5 % du PIB. Le Président de la République disait très justement, au début de son mandat, « la dette c'est l'impôt au carré ». Je m'inquiète aujourd'hui que cette maxime ne nous guide pas systématiquement dans nos prises de décision. Bercy persiste et nous l'assure : il n'y aura pas de hausse d'impôts – au moins, pendant ce quinquennat. Mais faire preuve de responsabilité et de volontarisme politique implique aussi de ne pas perdre de vue l'équilibre de nos finances publiques. Nous devons ainsi être capables de dépasser l'unique perspective d'une relance conjoncturelle. En d'autres termes, notre défi n'est pas d'apporter des réponses à nos problématiques d'aujourd'hui : il est d'ores et déjà de répondre à celles de demain.

En effet, les dépenses de relance sont nécessaires, et nous y apportons tout notre soutien. Mais nous devons aussi, pour les Français, faire preuve de vigilance et de prudence, afin de ne pas sacrifier les générations futures. Un budget responsable est un budget réaliste et cohérent, qui s'inscrit dans le long terme et prévoit des réformes structurelles pérennes. Il doit, avant tout, être un budget sincère.

Quelques remarques au sujet des impôts de production : pour stimuler la compétitivité des entreprises, vous en prévoyez une diminution d'environ 10 milliards d'euros, par la réduction de moitié de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la réévaluation de la méthode comptable d'évaluation servant au calcul de la cotisation foncière des entreprises et l'abaissement du taux de plafonnement de la contribution économique territoriale de 3 % à 2 %.

Nous saluons cette mesure car, dans un pays où la pression fiscale est toujours aussi forte, nos entreprises en ont besoin. Cependant, la question de la compensation financière se pose également en termes d'enjeux d'autonomie fiscale des collectivités territoriales. En effet, même si la compensation de l'État aux communes et intercommunalités tiendra compte de l'évolution des valeurs locatives, le taux d'imposition appliqué par l'État pour calculer la compensation restera, lui, fixe. Il doit encore être déterminé, au cours de nos débats. Les collectivités territoriales pourront toujours augmenter le taux sur l'impôt effectivement payé par l'entreprise, mais elles perdront la main sur l'impôt, fictif, reversé par l'État.

Concrètement, nous devons veiller à ce que le dispositif de neutralisation garantisse une compensation financière dynamique et pérenne, qui tienne compte de l'évolution des bases et des taux votés par les élus. Autrement dit, la modulation du levier des recettes ne saurait constituer à elle seule une mesure de long terme.

Lors du dernier PLFR, le troisième, nous nous inquiétions déjà de la situation des collectivités locales, sorties très affectées par la crise en raison de la baisse de leurs recettes fiscales couplée à la hausse de leurs dépenses sociales. Compenser les pertes subies doit donc rester notre préoccupation première.

Par ailleurs, nous nous devons d'être attentifs et de soutenir chacune des communes, déjà si inquiètes pour leur avenir. En juin 2020, j'ai déjà alerté le Gouvernement sur le montant des dotations de compensation des pertes de recettes des communes, prévues par la troisième loi de finances rectificative, en particulier pour les communes dont les revenus sont liés aux casinos – notamment dans le territoire vosgiens, aussi bien à Bussang et à Gérardmer qu'à Plombières-les-Bains. À ce jour, mon courrier est resté sans réponse : …

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