Intervention de Éric Woerth

Séance en hémicycle du lundi 12 octobre 2020 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2021 — Article liminaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Woerth, président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

Cet amendement, ainsi que le suivant, no 1272, sont des amendements d'appel – d'appel au secours, presque, pour des finances publiques en grande difficulté. J'ai l'impression que le Gouvernement sous-estime la gravité de la situation ; beaucoup d'orateurs en ont fait la remarque, et ils ne se trompent pas nécessairement. Personne n'a dit qu'il était anormal de dépenser beaucoup dans une situation de crise, et nous l'acceptons évidemment. Il faut bien sûr compenser les pertes. Et nous acceptons aussi que l'on aille plus loin, et que la relance comprenne une part d'investissement.

Mais il y a une composante des dépenses que vous nous proposez qui n'est pas acceptable : ce sont celles qui concernent le fonctionnement normal de l'État. Quand vous augmentez le budget du ministère de la justice comme vous le faites, ou quand vous revalorisez les rémunérations d'un certain nombre de catégories professionnelles sans avoir discuté de l'organisation des services, vous vous situez dans une perspective classique, et au fond assez laxiste. Vous devriez au contraire concentrer les dépenses sur la relance de notre pays. Et tout cela se traduit par de la dette.

Les amendements identiques nos 718 et 1270 essaient de mettre en évidence ce phénomène, à partir d'un ratio assez simple, le rapport du déficit de l'État et des recettes fiscales nettes. En juillet 2020, quand le déficit prévisionnel de l'État était de 225 milliards d'euros, ce ratio a failli atteindre 100 %. En 2021, selon vos chiffres, il sera de 56 % ; il est de 80 % environ pour l'année 2020. Il s'était jusque-là toujours situé, en moyenne, entre 20 % et 25 %.

C'est considérable : comment sort-on d'un tel engrenage, et en combien de temps ? Ces 117 % de dette sont peut-être supportables pendant quelque temps, mais pas pendant très longtemps, surtout avec 2,9 % d'augmentation de la dépense en volume, hors dépenses de crise.

Quant aux amendements identiques suivants, nos 721 et 1272, ils rebondissent sur le débat que nous venons d'avoir : ils demandent que, dans une situation aussi volatile, aussi imprévisible, le budget soit accompagné de scénarios – sortie de crise rapide ou sortie plus longue – , ce qui permettrait de montrer comment chacun de ces scénarios affecterait les grands équilibres de nos finances publiques. La Cour des comptes l'a fait, et nous avons repris ses tableaux : il y a dix points d'écart entre les hypothèses haute et basse.

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