Mon rapport porte sur les crédits du budget relatifs à l'économie numérique et aux télécommunications. Outre l'analyse de ces crédits, sur laquelle je vais revenir, j'ai consacré une importante partie de ce rapport à deux sujets qui me sont chers : d'une part, un bilan d'étape de la politique d'ouverture des données publiques à la suite de l'adoption de la loi pour une République numérique, et d'autre part la mise en oeuvre d'un État-plateforme, qui s'appuie sur la digitalisation des services publics pour s'adapter aux usages de nos concitoyens.
Pour ce qui est des crédits, je dois faire le constat d'un budget équilibré. S'agissant de la fiscalité des opérateurs de télécommunications, nous sommes dans une période particulière. Plusieurs autorisations de fréquences sont en train d'être renégociées entre le Gouvernement et les opérateurs, et nous souhaitons que cette négociation soit la plus exigeante possible en matière de couverture numérique. Cela devra peut-être passer par la remise à plat de la fiscalité spécifique des télécoms.
Dans un premier temps, et dans la perspective du futur déploiement de la 5G, il pourrait être opportun d'envisager un plafonnement de l'IFER « mobile » – imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux, concernant les antennes-relais de téléphonie mobile – en échange d'engagements de déploiement ambitieux de la part des opérateurs de télécommunication.
Dans un second temps, votre rapporteure souhaite que cette réflexion s'intègre dans le contexte plus général du marché européen des télécommunications, qui posera de nouveaux défis en termes de fiscalité des réseaux. Cette nouvelle échelle, qui apportera de nouvelles opportunités à nos entreprises, pourrait rendre nécessaire une base fiscale plus pertinente de l'IFER fixe, qui ne concerne aujourd'hui que le réseau en cuivre, ainsi qu'une réduction, voire une suppression de la taxe sur les opérateurs de téléphonie mobile. C'est pour cela que je n'ai pas déposé d'amendement de nature fiscale sur ce sujet : attendons de connaître le fruit de ces négociations pour intervenir.
Enfin, en ce qui concerne le budget des opérateurs, je dois admettre une certaine perplexité, sinon une véritable inquiétude, quant aux perspectives budgétaires de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes – ARCEP. De nouvelles missions sont confiées, à un rythme très régulier, à cette autorité indépendante, souvent à l'initiative du Parlement, qui a confiance dans ses analyses et dans son expertise. Pourtant le plafond d'emplois de l'ARCEP risque d'être réduit, ce qui me semble incompatible avec l'exécution de ces missions. J'attire donc l'attention du ministre sur l'importance de préserver le budget et les emplois de cette autorité administrative indépendante.
Sur la partie thématique, où en sommes-nous de l'open data en France ? J'ai mené une dizaine d'auditions sur ce sujet, et j'ai ainsi constaté que l'ouverture des données publiques est à la fois bénéfique pour les services de l'État mais également pour les usagers et pour l'écosystème d'innovation français. Il faut donc continuer à promouvoir l'expansion de cette politique, en particulier auprès des administrations qui ne sont pas encore toutes au fait de leurs nouvelles obligations légales.
À ce titre, je salue la mission Etalab pour le travail de pédagogie qu'elle accomplit au sein des services de l'État, ainsi que la CADA – Commission d'accès aux documents administratifs – et la CNIL – Commission nationale de l'informatique et des libertés – pour avoir su avec brio s'adapter à la révolution numérique de leurs missions.
Toutefois, pour que la politique d'open data prospère, il est urgent de simplifier le cadre juridique et d'en améliorer la lisibilité. En effet, de nombreuses lois récentes définissent les données de façon différente et emploient des concepts mal déterminés. Ceci concerne toutes les entreprises et tous les services dont le modèle économique est basé sur l'exploitation des données, comme Météo-France, l'IGN – l'Institut géographique national – ou l'INSEE. Ces entreprises doivent y voir clair pour se transformer efficacement.
En lien avec l'open data, il y a bien sûr la politique de transformation numérique de l'État. Il faut promouvoir la constitution d'un État-plateforme, c'est-à-dire d'un État qui « horizontalise » les relations entre les services publics et les usagers, en créant de nouveaux usages et en définissant une meilleure qualité de service. Dans le cadre du programme Action publique 2022, la transformation numérique de l'État est prioritaire : c'est bienvenu. Il faudrait cependant encourager les initiatives déjà existantes, comme les « startup d'État » de la DINSIC – direction interministérielle du numérique et du système d'information et de communication de l'État – qui, avec peu de moyens, obtiennent d'admirables résultats en matière d'efficacité du service public.
Mon rapport et mes propositions sont l'occasion de rappeler que l'État-plateforme ne sera pertinent que si les 13 millions de personnes qui, aujourd'hui, n'ont pas accès à internet ou ne savent pas s'en servir sont correctement accompagnées dans le cadre d'une politique d'inclusion numérique très ambitieuse.