Intervention de François Ruffin

Séance en hémicycle du samedi 24 octobre 2020 à 15h00
Prorogation de l'état d'urgence sanitaire — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Ruffin :

Le rapporteur et la ministre déléguée chargée de l'autonomie sont là, mais ils ne semblent pas même chercher à convaincre et à répondre sur la mise entre parenthèses de l'État de droit. Car oui, c'est bien de cela qu'il s'agit. Ce soir, nous ne discutons pas du fond des mesures, du couvre-feu, du confinement ou de la fermeture des bars et des restaurants. Non. La question dont nous discutons est la suivante : doit-on continuer à mettre notre État de droit entre parenthèses ?

À gauche, les socialistes, les communistes et les Insoumis vous alertent. À droite, Les Républicains vous alertent également, tout comme les indépendants de l'UDI et les députés du groupe Libertés et territoires. En dehors de l'hémicycle, on vous alerte aussi. « En temps de paix, la République n'a jamais connu une telle restriction des libertés », vous dit le président de la Commission nationale consultative des droits de l'homme. Quant au président du Conseil scientifique et à cinq de ses collègues, ils réclament une approche moins verticale, moins technocratique, plus ouverte et plus inclusive.

En signant ce chèque au blanc, vous ne rendez service ni au Gouvernement, ni au Président de la République, qui, au fond, se trouve encouragé à poursuivre son action dans la solitude du pouvoir, dans la surdité, dans l'absence de dialogue avec l'Assemblée et, plus largement, avec la société.

Que risque-t-il se produire ? Vous avez géré la crise des gilets jaunes par des mesures policières et vous faites de même avec la crise du covid-19. Ce qui risque de se produire est une rupture, une cassure dans le pays. Et, je vous le dis, dans le domaine de la santé, je ne le souhaite pas. Je préférerais une homogénéité du corps social dans l'acceptation des mesures. Mais la manière avec laquelle vous conduisez les choses rend cela impossible. Il n'est pas possible de continuer à décider seuls, de « dévoiler » – comme j'ai pu l'entendre à propos du Premier ministre – brutalement et soudainement des mesures dont on ignorait tout l'instant précédent, comme s'il s'agissait d'un linge que l'on ferait glisser d'une statue. Cela ne peut pas marcher dans la durée.

André Malraux disait : « Le mot ''non'', fermement opposé à la force, possède une puissance mystérieuse qui vient du fond des siècles. Toutes les plus hautes figures spirituelles de l'humanité ont dit non à César. [… ] L'esclave dit toujours oui. » Ce soir, je dis non. Nous disons non.

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