Un projet de budget n'a de sens qu'en rapport avec un projet politique et une vision stratégique concernant le périmètre ministériel dont il est question. En matière d'enseignement supérieur et de recherche, on constate d'abord qu'on ne comprend pas très bien quelle est la stratégie ministérielle : quelle est la vision du Gouvernement, à court, à moyen et à long terme, pour l'enseignement supérieur et la recherche en France ? En outre, depuis 2017, c'est-à-dire depuis que vous êtes ministre, vous tenez chaque année le même discours, annonçant un budget historique et inédit.
Ce qui est inédit, madame la ministre, c'est que depuis 2017, on observe effectivement une constante : lorsque l'on compare vos projets de budget avec l'exécution budgétaire, on s'aperçoit que vous annulez des crédits en cours d'année par rapport à ce que nous avions voté, et par conséquent que vous sous-exécutez votre budget ; ce sont sans doute Bercy et Matignon qui vous y obligent. Vous comprendrez donc aisément qu'en vous entendant affirmer, pour la quatrième année consécutive, que le projet de budget de la recherche et de l'enseignement supérieur est historique, non seulement nous avons du mal à vous croire, mais de plus nous pensons que la ficelle est un peu grosse.
Au Mans, il y a quelques jours, vous avez affirmé devant des enseignants-chercheurs que rien n'avait été fait depuis vingt ans. Non seulement cette assertion est mensongère et scandaleuse, mais en outre, je vous le dis tout net, elle décrédibilise d'autant plus votre propre parole politique que vous avez été présidente d'une université qui a bénéficié des financements du programme IDEX, les initiatives d'excellence : vous savez donc qu'au cours des vingt dernières années, certaines choses se sont passées.
Mais venons-en à votre trajectoire budgétaire, telle qu'elle apparaît à la fois dans votre projet de loi de programmation de la recherche et, très immédiatement, dans les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » pour l'année 2021.
Je veux dénoncer en priorité l'asphyxie budgétaire à laquelle, contrairement à ce que vous annoncez, vous allez continuer selon moi de soumettre tous les opérateurs de l'enseignement supérieur et de la recherche. En effet, le projet de budget qui leur est consacré ne prend que partiellement en compte la cotisation employeur pour les retraites des fonctionnaires : la fameuse contribution au compte d'affectation spéciale « Pensions ». Nous avons eu ce débat en commission des finances, où M. Chouat a défendu des amendements tendant à résoudre le problème pour les organismes de recherche. Ma première question porte donc sur ce point – bien que je l'aie répétée à maintes reprises lors des débats sur le projet de loi de programmation de la recherche, il y a quelques semaines, vous n'y avez jamais répondu.
L'asphyxie est aggravée par un second problème : vous ne compensez nullement le fameux glissement vieillissement technicité. Organismes de recherche plus établissements d'enseignement supérieur et de recherche, on peut considérer que cela pèse annuellement à hauteur d'une centaine de millions d'euros sur les opérateurs concernés, réduisant d'autant leur capacité d'action. Voici donc ma deuxième question : allez-vous enfin compenser le GVT pour l'ensemble des opérateurs de la MIRES ?
L'asphyxie est encore aggravée, de surcroît, par le fait que le nombre d'étudiants n'a cessé de croître. En tant que ministre, vous détenez par conséquent un triste record : le plus mauvais taux d'étudiants par enseignant. Cet indicateur est passé au rouge vif depuis 2017 ; seuls trois pays de l'Union européenne en ont un plus mauvais, alors qu'ils étaient encore sept en 2014.
Nous sommes aussi en train de creuser l'écart par rapport à la plupart des pays de l'Union européenne puisque le budget des établissements n'a fait que décroître ces dernières années et il en résulte que la dépense par étudiant a diminué depuis que vous êtes ministre, le tout en euros constants comme en euros courants.
Plus je regarde vos actions et je les mets en parallèle avec les budgets, plus je m'inquiète pour l'enseignement supérieur et la recherche. Malgré les chiffres annoncés, il y a un effet trompe-l'oeil, déjà évoqué par notre collègue Descoeur. On a du mal à comprendre comment le processus d'asphyxie des opérateurs que je viens de décrire pourrait être enrayé par le budget présenté. Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains votera contre le budget de la MIRES.