Cela dit, il ne me paraît pas opportun d'opposer les malheurs des policiers – dont je ne conteste pas la réalité, et que je déplore – à ceux des gilets jaunes, parmi lesquels on a compté vingt-quatre éborgnements et cinq mains coupées. C'est justement ce qu'il faut éviter, que dans notre pays les policiers et les manifestants se traitent en ennemis et aillent jusqu'à se mutiler les uns les autres.
Je comprends bien, madame la ministre déléguée, qu'étant donné votre position vous ayez à vous montrer solidaire de la police, mais ce n'est pas en cassant le thermomètre, c'est-à-dire en niant qu'il y ait des difficultés entre la police et une partie des citoyens, qu'on va résoudre le problème. Or il faut le résoudre ! On sait bien qu'une personne noire ou arabe a cinq à huit fois plus de risques de se faire contrôler : c'est factuel. Dans une étude européenne comparée de la légitimité des polices, le sociologue Sébastien Roché a souligné le « grand décrochage français ». Fondant son analyse sur des statistiques internationales, à la question : « La police traite-t-elle les personnes avec respect ? », il en arrive à la conclusion que la France est en queue de peloton et que seuls certains pays de l'Est – Ukraine, Russie, Bulgarie ou Slovaquie – font pire.
Tout ce que je dis, c'est qu'il y a un vrai problème et que nier son existence ne va pas nous aider à améliorer la qualité de la police. Cela signifie non pas que je sois anti-police, mais simplement que j'estime qu'il y a du travail à faire en matière de formation initiale et continue.