Intervention de Sabine Rubin

Séance en hémicycle du mercredi 28 octobre 2020 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Enseignement scolaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSabine Rubin :

Puisqu'il est question d'enseignement scolaire et que le ministre a fait des études de philosophie, je placerai mon intervention sous l'auspice de la reproduction du tableau de Raphaël qui surplombe la tribune, L'École d'Athènes. Voilà près de 2 500 ans, Platon, dont la figure est au centre, ferraillait déjà contre les sophistes corrupteurs qui, par de fines et subtiles palabres, faisaient se disjoindre le discours et la vérité. Il semble, monsieur le ministre, que vous soyez le digne héritier des Gorgias et consorts, avec votre communication et vos effets de manche qui se trouvent être à rebours de l'expérience vécue par une majorité de la communauté éducative.

En effet, la fameuse priorité donnée à l'enseignement primaire, valable en son principe, vous sert de vitrine pour cacher une triste réalité. Ainsi les classes dédoublées en REP souffrent-elles de l'absence totale de maîtres spécialisés et d'AESH. Or la difficulté scolaire n'est pas réductible à la seule question des effectifs. Que dire en outre des 80 % d'élèves hors REP, qui sont eux aussi privés de ces personnels spécialisés des RASED, les réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté ? En résumé, déshabiller Pierre pour habiller Paul, voilà le fin mot de votre politique, qui s'exerce notamment au détriment du secondaire : alors que plus de 23 000 élèves supplémentaires sont attendus sur les bancs des collègues et lycées, on compte près de 1 800 postes en moins dans le second degré – sans parler des purges des années précédentes. Vous palliez certes ce déficit chronique d'encadrement par le recours tous azimuts aux heures supplémentaires obligatoires – jusqu'à 2 500 équivalents temps plein cette année. Rappelons pourtant qu'en 2013, ces professeurs, dont certains ont dit qu'ils étaient décrocheurs, travaillaient déjà en moyenne près de quarante et une heures par semaine.

Alors, exploitant sordidement l'assassinat de Samuel Paty, on prétend que les enseignants de ce pays sont choyés. Choyés, nos enseignants, dont le salaire, pour les statutaires, est inférieur de près de 18 % à la moyenne observée au sein de l'OCDE, l'Organisation de coopération et de développement économiques ? Votre prétendue revalorisation n'est en effet qu'une mascarade : une augmentation d'à peine 38,50 euros bruts par mois – et, pour certains, une prime à la réussite ! Sophisme donc, quand vous annoncez la toison d'or et qu'on voit venir la peau de chagrin.

Alors qu'on reconnaît désormais la spécificité du métier de ces hussards de la République, comment comprendre le recours massif aux contractuels pour pourvoir des postes pérennes ? Ils sont sans formation initiale pour exercer le plus beau et le plus exigeant métier du monde, et ce dans la plus grande précarité.

Puisque j'évoque la précarité, parlons des AESH et de cet autre sophisme que vous maniez au sujet de l'inclusion scolaire. La réalité, en la matière, reste l'extrême précarité d'accompagnants payés au lance-pierre, toujours pas titularisés et maintenant mutualisés dans les PIAL en vertu d'une gestion purement comptable de l'éducation. Il n'est pas étonnant que vous peiniez à recruter ce personnel, malgré l'ouverture de 4 000 postes supplémentaires.

Sophisme encore quand je vous entends gloser sur l'importance de l'éducation morale et civile, alors que vous avez rabougri les heures de culture générale, notamment d'histoire-géographie, dans les lycées professionnels, …

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