Je tiens tout d'abord à remercier l'ensemble des orateurs pour leurs interventions, et plus particulièrement les rapporteurs spéciaux, qui ont produit comme chaque année un travail précis et exigeant d'analyse des crédits.
Les crédits que vous examinez ce soir sont d'une grande diversité mais tous sont indispensables au bon fonctionnement de notre État de droit. Ils visent à garantir aux pouvoirs publics, aux organes chargés de leur contrôle ainsi qu'aux autorités indépendantes qui s'assurent du respect d'un certain nombre de libertés individuelles, les moyens nécessaires à leur action.
La crise sanitaire a conduit l'ensemble des personnels qui relèvent de ces missions à travailler différemment, souvent à distance, en s'adaptant à des contraintes nouvelles. Je salue leur engagement et les efforts qu'ils ont fournis pour assurer la continuité des missions précieuses qui sont les leurs, malgré des conditions difficiles.
Permettez-moi à présent d'entrer un peu plus dans le détail des crédits qui vous sont présentés. La mission « Conseil et contrôle de l'État » retient comme chaque année l'attention des députés sur tous les bancs. Ces crédits sont en hausse de 2 % et traduisent un effort constant d'investissement depuis le début de cette législature dans les juridictions administratives et financières.
Le PLF pour 2021 s'inscrit dans la trajectoire d'accroissement des moyens humains des juridictions administratives avec la création de vingt-huit postes, dont dix-huit au bénéfice de la nouvelle cour administrative d'appel de Toulouse qui verra le jour en 2022. Dix postes seront également créés afin de renforcer les juridictions administratives, qui ont déjà bénéficié de vingt-neuf créations de postes inscrits dans le PLF 2020. Le cycle d'investissement de plus de 7 millions d'euros nécessaires à la construction des locaux qui abriteront cette neuvième cour d'appel touche à sa fin, ce qui se traduit par une baisse des crédits d'investissement, qui ne doit pas masquer un effort pluriannuel très important. À terme, la nouvelle cour administrative d'appel permettra de désengorger celles de Bordeaux et de Marseille.
La Cour nationale du droit d'asile a bénéficié de 80 % des créations d'emplois. Madame Faucillon, vous avez dit que le Gouvernement n'était pas allé assez loin dans la mobilisation d'emplois, et pourtant ! Je dois d'ailleurs reconnaître que les gouvernements qui nous ont précédés l'ont fait dès 2015 : je rappelle donc qu'en 2015 vingt-trois emplois ont été créés, en 2016 vingt-quatre, en 2017 quarante, en 2018 cent deux, en 2019 cent vingt-sept et en 2020 cinquante-neuf, soit 80 % des créations d'emplois inscrits à ce programme.
Ces juridictions administratives ont néanmoins particulièrement souffert de la période de confinement et de la crise sanitaire en général, comme l'ont souligné votre rapporteur spécial M. Labaronne ainsi que M. Pancher, Mme Faucillon et Mme Karamanli. Le délai de traitement des dossiers s'est effectivement allongé alors qu'il devait être divisé par trois sous l'effet des nouveaux moyens alloués que je viens de décliner.
Si aucune création d'emplois n'est prévue en 2021, celles budgétées pour 2020 qui n'auront pas été réalisées sont reportées au prochain exercice. En outre, les investissements immobiliers ont permis d'agrandir les locaux de la CNDA. Compte tenu de ces investissements et des recrutements réalisés, la CNDA devrait pouvoir, si la situation sanitaire le permet, se rapprocher de sa capacité de jugement maximale au cours de l'année 2021 et tendre vers les objectifs prévus par la loi.
La Cour des comptes et les juridictions financières ont moins souffert des conséquences de la crise sanitaire puisque leur mode de fonctionnement repose déjà sur une part importante de travail dématérialisé. Leurs crédits sont en légère progression, notamment sous l'effet d'un schéma d'emplois positif qui conduira à dix recrutements supplémentaires en 2021. Cette hausse s'inscrit dans la tendance des années passées. Elle permet d'accompagner l'accroissement de la charge de travail des juridictions financières en intégrant de nouvelles compétences dans le champ de l'analyse des données et du développement informatique, ainsi que la préparation de la candidature de la Cour au Comité des commissaires aux comptes de l'ONU, reconnu comme un objectif stratégique par le Président de la République.
Plusieurs orateurs se sont émus de l'augmentation significative des crédits du Haut Conseil des finances publiques. Cette hausse des dépenses de personnel vise à permettre des recrutements supplémentaires afin de doter le Haut Conseil des moyens humains nécessaires à l'exercice et au développement de sa mission qui, je le rappelle, est d'apporter une expertise indépendante au Parlement et au Gouvernement. En dépit de ces recrutements, le Haut Conseil demeure sur la scène européenne une institution budgétaire de taille réduite en comparaison de pays voisins tels que l'Espagne, l'Italie ou l'Autriche. Néanmoins, dans le contexte actuel tout particulièrement, il apparaît normal d'inscrire cet accroissement de moyens dans le temps long. Nous devrions, je crois, pouvoir trouver une solution de compromis lors de l'examen des amendements.
Le CESE, évoqué par Mme Trastour-Isnart et, plus positivement, par Mme Brocard, voit son budget se stabiliser à l'approche d'une réforme majeure inscrite dans le projet de loi organique que vous avez adopté en première lecture. La réduction du nombre de membres du CESE permettra – mais cette réforme ne s'appliquera qu'à partir du mois de juin – une baisse des dépenses liées aux indemnités des conseillers, économies qui seront nécessaires pour mettre en oeuvre les nouvelles prérogatives du Conseil, notamment en matière de participation citoyenne. Ces moyens seront d'autant plus essentiels que les ressources du CESE se trouvent fortement amoindries par la crise sanitaire.
J'en viens à présent aux crédits de la mission « Pouvoirs publics », qui demeurent stables, en légère baisse, même, de 0,05 % par rapport à l'exercice 2020. Le Conseil constitutionnel connaît une baisse de son budget de 3,88 %, en partie liée à la baisse de son activité par rapport aux années 2019 et 2020 qui étaient marquées par le contrôle du référendum d'initiative partagée.
J'ai entendu les remarques de M. le rapporteur spécial Naegelen et de M. Benoit au sujet de l'indemnité des membres du Conseil et de son cumul avec d'autres revenus. Je veux rappeler que l'indemnité du président et des membres du Conseil est encadrée par la loi organique qui en fixe les principes. Elle leur proscrit par ailleurs l'exercice de toute fonction publique et de toute autre activité professionnelle. L'indemnité versée aux membres est stable et s'apparente au traitement des présidents de section du Conseil d'État ou des présidents de chambre à la Cour des comptes. L'ensemble de ces éléments de rémunération est soumis aux impositions et cotisations de droit commun.
Le Gouvernement a montré son engagement sur le sujet des rémunérations au sein des autorités administratives indépendantes. Comme je l'avais indiqué à l'occasion de l'examen de votre proposition de loi, monsieur Benoit, l'article 38 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique a posé le principe de la limitation des rémunérations perçues par les membres des autorités indépendantes qui perçoivent par ailleurs une pension de retraite. Un décret a été pris au début de l'année pour l'application de ce dispositif, conformément à nos engagements. Cette loi a également consacré d'importants efforts en matière de transparence des rémunérations.
En revanche, concernant un éventuel écrêtement de l'indemnité des membres du Conseil constitutionnel, le Gouvernement était ouvert à une discussion, et l'a démontré, mais le caractère organique des dispositions qu'il conviendrait de prendre ne leur permet pas de trouver leur place en loi de finances.
Cette année, comme l'a souligné M. Lauzzana, le budget de la Présidence de la République est en légère baisse, du fait à la fois d'une moindre dotation en loi de finances par rapport à 2020 et d'une baisse du prélèvement sur les disponibilités, fixé à 2,5 millions d'euros pour 2021. Conformément aux recommandations de la Cour des comptes, la Présidence de la République continue son programme d'investissement dans l'entretien et la valorisation de son patrimoine.
Pour répondre à M. Pancher, je m'abstiendrai de tout commentaire concernant soit le budget soit le fonctionnement de votre assemblée. Ce budget reste stable en 2021, conformément aux décisions prises par la commission commune à l'Assemblée et au Sénat dont c'était la charge. Il n'appartient pas au Gouvernement de juger du niveau de la dotation, y compris pour faire face à une période de crise comme celle que nous traversons.
Certains d'entre vous, à commencer par M. le rapporteur spécial Naegelen, se sont interrogés sur le niveau de la dotation allouée à la Cour de justice de la République, dont l'activité pourrait croître sous l'effet de plaintes liées à la gestion par les pouvoirs publics de la crise sanitaire. De même que pour l'ensemble des crédits de cette mission, la CJR a fait part de ses demandes concernant son budget, et il y a tout simplement été fait droit. La Cour n'a pas fait connaître de demandes complémentaires, laissant supposer que les moyens qu'elle a demandés sont suffisants.
J'en viens à présent à la mission « Direction de l'action du Gouvernement », à laquelle est ajouté pour 2021 et 2022 un nouveau programme consacré à la présidence française du Conseil de l'Union européenne au premier semestre 2022. Si l'on isole les crédits de ce programme éphémère, sur lequel je reviendrai, les crédits de la mission sont en légère hausse, de 2,7 %, en 2021, principalement sous l'effet de créations de postes et de l'investissement dans les secteurs prioritaires de la mission.
Les crédits du programme « Coordination du travail gouvernemental » évoluent sous l'effet d'un schéma d'emploi dynamique au profit notamment du Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, comme l'a salué Mme Lemoine, avec la création de soixante-deux postes qui seront en grande partie affectés à l'ANSSI, et du Secrétariat général des affaires européennes, avec dix postes supplémentaires, mais temporaires, en prévision de la prochaine présidence du Conseil de l'UE.
La suppression de l'Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice vient compenser en partie cette évolution du schéma d'emplois puisqu'elle emporte la disparition des soixante et onze ETP correspondant à son plafond d'emploi. Les missions de cet institut ont été reprises par l'Institut des hautes études du ministère de l'intérieur, service à compétence nationale placé sous la responsabilité du ministère.
Mme Dalloz s'interroge sur les effets de la création du nouveau Haut-Commissariat au plan et l'augmentation de la taille des cabinets ministériels depuis le remaniement. Nous aurons l'occasion de revenir sur cette question lors de l'examen des amendements mais je peux déjà vous indiquer que cela ne devrait pas conduire à une hausse du plafond d'emploi et des crédits de personnel, qui sont suffisamment calibrés pour supporter la trentaine de recrutements supplémentaires. Les autres personnels qui ont rejoint les cabinets sont mis à disposition de ceux-ci.
Le Haut-Commissariat au plan verra son budget de fonctionnement inclus dans les dépenses mutualisées du programme, dont l'objet est d'assurer le soutien des entités rattachées au Premier ministre. Ses personnels seront, comme pour les cabinets, pris en charge sans demande de moyens supplémentaires.
S'agissant des autres dépenses du programme 129, on notera notamment une hausse de 9,5 millions des dépenses correspondant à l'investissement nécessaire pour permettre l'implantation d'une antenne de l'ANSSI à Rennes dès 2022, comme l'a souligné Mme Brocard, afin de constituer un pôle de compétences en cyberdéfense avec le ministère des armées, en cohérence avec la croissance des missions et des effectifs de l'Agence.
Je reviens sur la question soulevée par Mme Dalloz concernant le service d'information du Gouvernement. Le budget de fonctionnement qui lui est alloué est stable pour l'année 2021, à 14,2 millions, mais ce service a connu, vous le savez, une très forte activité en 2019 comme en 2020, sous l'effet de circonstances exceptionnelles. Durant la crise sanitaire, le SIG a notamment été chargé d'une plateforme téléphonique d'information des citoyens, qui a engendré un coût important, s'ajoutant à ses dépenses de fonctionnement courant. On peut espérer qu'en 2021 le SIG sera en mesure d'exercer normalement ses attributions, ce qui justifie le niveau de sa dotation dans le PLF.
Comme l'an dernier, un certain nombre de créations d'emplois de la mission concernent le programme « Protection des droits et libertés » et visent à permettre aux autorités administratives indépendantes d'exercer au mieux leurs prérogatives. Le budget du programme est en hausse de 2,3 % sous l'effet d'un schéma d'emploi dynamique, avec vingt-sept ETP supplémentaires. Ainsi la CNIL bénéficiera-t-elle de vingt créations de poste, lui permettant de faire face à un accroissement très important du nombre de saisines, liées notamment à la mise en oeuvre du règlement général sur la protection des données – RGPD.
Le Défenseur des droits bénéficiera également de deux créations nettes de postes pour faire face à une activité toujours croissante. La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, qui a repris une partie des missions de la commission de déontologie de la fonction publique, a bénéficié, dans ce cadre, du transfert de quatre ETP et se verra dotée de deux ETP supplémentaires en 2021.
J'en viens, enfin, au nouveau programme de la mission, qui permettra l'organisation de la présidence française du Conseil de l'Union européenne. Il représente un budget de 150 millions au total sur deux ans, ce qui correspond environ aux dépenses constatées lors du dernier exercice en 2008. J'ai bien noté, cependant, l'appel à la prudence de Mme Dalloz. En 2021, le programme disposera de 47,4 millions en crédits de paiement. Contrairement à ce qui a été dit par certains orateurs, ce montant a été arrêté au plus juste de ce qui devra être effectivement réglé avant le début de la présidence pour des actions de communication ou la location de salles ou d'espaces.
Les crédits accordés à la direction de l'information légale et administrative n'appellent pas d'observation particulière. Ce budget annexe demeure excédentaire pour l'année 2020 malgré une très forte baisse des recettes liée à la crise économique. La DILA poursuit la transformation de son fonctionnement et continue d'investir dans les outils numériques mis à disposition des citoyens.
Mesdames et messieurs les députés, je vous prie, pour conclure, de bien vouloir adopter les crédits de ces trois missions et de ce budget annexe.