Intervention de Naïma Moutchou

Séance en hémicycle du lundi 2 novembre 2020 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Justice

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNaïma Moutchou :

Depuis 2017, avec le soutien de la majorité, tous les budgets de la justice se sont inscrits dans une continuité d'augmentation. Pour cet avant-dernier projet de loi de finances, vous aviez annoncé, monsieur le ministre, un budget inédit pour la justice. Nous y sommes : avec une augmentation de plus de 8 %, soit 607 millions d'euros supplémentaires – le double de la loi de programmation, elle-même déjà ambitieuse – , c'est bien un effort considérable qui est consenti pour la justice.

Cet effort est d'autant plus remarquable qu'il est consenti en temps de crise. Pour certains, ce n'est pas assez, et je ne dirai pas le contraire, car nous savons tous que le chemin est encore long pour rattraper trente ans de retard structurel du fonctionnement de notre justice. Cependant, chacun doit convenir, puisque les chiffres ne mentent pas – encore faut-il être de bonne foi pour le reconnaître – , que le budget qui nous est présenté aujourd'hui par le garde des sceaux est historique : c'est la plus forte augmentation du budget de la justice observée au cours des vingt-cinq dernières années. Je pense que l'ensemble de la représentation nationale peut s'en féliciter, à défaut de vous en féliciter, monsieur le ministre, vous qui vous êtes battu pour obtenir ce budget et qui voulez l'inscrire dans la durée, vous qui avez su convaincre le Premier ministre de la nécessité non seulement de rattraper le retard, mais d'aller plus loin, car vous connaissez mieux que quiconque l'état de nos juridictions.

Cette hausse du budget qui le porterait à 8,2 milliards d'euros vient servir le projet que nous portons depuis trois ans, celui d'une justice proche, efficace, accessible, qui restaure la confiance. Comment ? D'abord en renforçant les moyens humains : il faut, surtout dans le contexte de la crise qui nous frappe, davantage de magistrats, de greffiers, de surveillants pénitentiaires, de conseillers d'insertion et de probation et d'éducateurs et, dans tous ces domaines, 2 450 postes vont être créés d'ici 2021, dont 950 sont sur le point d'être pourvus afin d'assister immédiatement les juridictions, les services pénitentiaires et la protection judiciaire de la jeunesse. Je précise que ce renfort s'applique évidemment à la lutte contre le terrorisme que nous avons entreprise, comme cela a été dit en commission.

Je ne reviens pas sur ce qu'a très bien dit mon collègue rapporteur Bruno Questel sur les moyens octroyés à l'administration pénitentiaire et à la protection judiciaire de la jeunesse, qui montrent combien le Gouvernement s'inscrit dans les priorités définies dès le début du quinquennat par le Président de la République, à savoir la justice des mineurs et l'amélioration des conditions pénitentiaires.

Je veux dire un mot également sur l'aide aux victimes, qui augmente de 11 %, et sur la dotation de 5 millions d'euros, qui permettra d'accélérer le déploiement des bracelets électroniques et antirapprochement – dont les premiers ont été posés avec succès dans mon département du Val d'Oise la semaine passée. Ce dispositif, qui constitue une avancée, est consacré par le budget qui nous est présenté.

Je conclus en évoquant un sujet incontournable, celui de l'aide juridictionnelle. L'attention que nous devons porter aux populations les plus fragiles doit redoubler en période de crise, y compris en matière d'accès à la justice. Il nous est proposé d'augmenter le budget de l'aide juridictionnelle de 55 millions d'euros, ce qui est une somme non négligeable, puisqu'elle représente 10 % de son budget total. Faut-il aller plus loin ? Je crois que oui, mais pas n'importe comment. Je l'ai moi-même recommandé dans deux rapports auxquels j'ai contribué, où je fixais la barre à 100 millions d'euros, et je ne me déjugerai pas sur ce point.

En revanche, vous m'avez convaincu sur un point essentiel, monsieur le ministre, celui de la méthode et de la concertation en cours. Il est vrai que ce sujet ne peut pas avancer sans les avocats, qui sont les piliers de l'accès au droit : il faut donc qu'ils soient associés à tous les échanges, à toutes les prises de contact nécessaires, notamment sur la question majeure de la refonte du barème – sur ce point, je sais que vous avez récemment entendu le Conseil national de l'aide juridique – CNAJ. Plus largement, je crois qu'il faut parvenir à engager le dialogue sur l'avenir de la profession d'avocat car ce beau métier, nous le savons, en a besoin.

En attendant, avec ces 50 millions d'euros en plus – une première étape ambitieuse qui en amènera d'autres – , vous mettez en oeuvre les préconisations des deux rapports auxquels j'ai contribué : je suis donc très subjectivement favorable aux amendements du Gouvernement que vous présenterez.

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