Intervention de Emmanuelle Ménard

Séance en hémicycle du lundi 2 novembre 2020 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Mission santé (état b)

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEmmanuelle Ménard :

Ces quatre amendements portent sur l'aide médicale d'État.

La crise sanitaire provoquée par le coronavirus a révélé un grand nombre de défaillances dans notre système de santé – quand je parle de défaillances, je parle bien évidemment du système en tant que tel, et non du personnel médical et des soignants. Ces défaillances concernent tout particulièrement notre offre de soins. Ainsi, j'ai déposé un certain nombre d'amendements visant à diminuer les crédits consacrés à l'AME en vue de rétablir une certaine équité dans notre système de soins.

Je rappelle que la majorité a voté, pas plus tard que la semaine dernière, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, l'instauration d'un forfait patients urgences d'un montant de 18 euros, à payer pour tout passage aux urgences sans hospitalisation.

Il a bien été précisé que ce forfait serait pris en charge pour les bénéficiaires de l'AME.

Il est grand temps, me semble-t-il, de se pencher sans passion sur le mécanisme de l'AME, dont le budget augmente année après année en dépit des affirmations du Gouvernement selon lesquelles il contrôle l'immigration. Rappelons que l'AME bénéficie aux personnes se trouvant en situation illégale sur le territoire français.

Lors de l'examen de la première partie du PLF, je me suis étonnée de la hausse des crédits de l'AME alors que le Gouvernement a fermé les frontières nationales pendant une partie de l'année 2020 en raison de la crise sanitaire. Pourtant, les crédits augmentent.

Mon inquiétude tient au fait qu'auparavant, nous étions plusieurs parlementaires à poser ces questions sur l'AME alors que depuis quelques mois, ce sont les soignants eux-mêmes qui donnent l'alerte au sujet du dévoiement de ce dispositif. Je vous prie de ne pas pousser de cris d'orfraie dès que l'on parle de dévoiement : de même que la procédure d'octroi de l'asile politique est dévoyée dans certains cas, l'AME l'est aussi.

Je me contenterai de citer le témoignage d'un grand chirurgien exerçant à l'hôpital public : « On a reçu un jour un malade nigérian de 30 ans souffrant d'un cancer. Il venait d'arriver en France, sans papiers, et presque aussitôt aux urgences à Paris dans l'espoir d'être sauvé. Dès les premiers examens, nous avons diagnostiqué () qu'il était inopérable et incurable. () Nous lui avons alors proposé de rentrer chez lui, pour mourir dans la dignité au milieu des siens. () Il est finalement resté deux semaines, sans verser un centime. À 1 317 euros la journée – faites le calcul. Et puis l'hôpital a ensuite payé son transfert vers un hôtel médicalisé qui ne coûtait que 3 000 euros par mois, en payant l'ardoise jusqu'à la fin ». Ce chirurgien ajoute que face à l'augmentation du nombre de patients originaires des mêmes pays, il est persuadé que des filières se sont créées, drainant un flux continu de candidats aux soins gratuits.

C'est au reste ce qui ressort du rapport que l'inspection générale des affaires sociales, l'IGAS, a publié en 2019, dans lequel elle constate un dévoiement de l'AME. J'insiste pour que ce débat ait lieu aujourd'hui et qu'il soit dépassionné.

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