Nous sommes réunis aujourd'hui pour examiner les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », dont j'assure l'examen avec Stella Dupont – laquelle est absente ce matin en raison de la modification de l'agenda parlementaire.
Dans le projet de loi de finances pour 2021, les crédits de la mission s'établissent à 1,8 milliard d'euros en autorisations d'engagement – AE – et à 1,9 milliard d'euros en crédits de paiement – CP. Par rapport à 2020, ces montants baissent de 8 % pour les AE et progressent de 2 % pour les CP. Ces crédits s'inscrivent dans un contexte profondément modifié par la pandémie et se caractérisent à la fois par des éléments de changement et par des éléments de continuité.
La modification du contexte migratoire est nette et résulte directement de la situation sanitaire. En 2020, pour la première fois depuis 2015, le nombre de demandes d'asile introduites en France baissera, en raison notamment des restrictions de déplacement observées depuis plusieurs mois. D'ici à la fin de l'année, 100 000 demandes d'asile devraient être introduites à l'OFPRA – l'Office français de protection des réfugiés et apatrides – , contre un peu plus de 130 000 en 2019. En 2021, 130 000 nouvelles demandes sont attendues – autant qu'en 2019. Les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » tiennent compte de ce nouveau contexte migratoire et présentent des éléments de continuité et de changement.
Pour ce qui est de la politique de l'asile, la continuité se traduit par la permanence des moyens élevés accordés à l'OFPRA : pour la deuxième année consécutive, son budget sera supérieur à 90 millions d'euros, alors qu'il n'était que de 65 millions d'euros en 2017. Les recrutements effectués par l'OFPRA devraient permettre à cet établissement de rendre 170 000 décisions en 2021, contre 115 000 en 2018, ce qui favorisera une réduction sensible du délai de traitement des demandes d'asile.
En matière de lutte contre l'immigration irrégulière, la continuité se traduit par la poursuite de la hausse des moyens. Les investissements dans la rénovation et l'extension des centres de rétention administrative – CRA – sont confirmés et 1 500 places seront créées par la mission « Plan de relance » dans les centres de préparation au retour. La multiplication attendue des éloignements aidés constitue à mes yeux un point de satisfaction, puisqu'elle prend en considération certaines des recommandations qu'Alexandre Holroyd et moi-même avions formulées il y a un an.
La politique de l'asile connaît cependant deux évolutions importantes. La première tient à la création de 4 500 places supplémentaires d'hébergement, dont 500 au titre de la mission « Plan de relance ». Un an après avoir mis l'accent sur les recrutements en faveur de l'OFPRA, le projet de loi de finances fait ainsi porter l'effort sur l'accroissement des capacités d'hébergement.
La deuxième évolution importante tient au niveau des crédits de l'allocation pour demandeurs d'asile. Je veux insister sur ce point. Durant le printemps de l'évaluation, Stella Dupont et moi-même avons livré une analyse sans concession des erreurs de prévision budgétaire observées systématiquement ces dernières années. Lors de la préparation de notre rapport, nous avons longuement, et à plusieurs reprises, interrogé le ministère de l'intérieur sur ses hypothèses de construction du budget. Au terme de ces échanges, nous considérons que les hypothèses figurant dans le projet de loi de finances sont crédibles. La dépense prévue au titre de l'allocation pour demandeurs d'asile nous semble optimiste, mais plausible. Nous n'en resterons pas moins vigilants pendant les années à venir. À cet égard, nous nous félicitons que le ministère de l'intérieur ait tenu compte des précédentes observations de la commission des finances.
La mission « Immigration, asile et intégration » ne se limite pas au droit d'asile et à la lutte contre l'immigration irrégulière : elle comprend également des crédits dédiés à l'intégration. Pour ce qui est des moyens consacrés à ce volet, la continuité l'emporte et le très important effort financier accompli depuis 2017 se confirme. En 2021, les crédits du programme 104, « Intégration et accès à la nationalité française », s'établiront ainsi 433 millions d'euros alors qu'ils se limitaient à 180 millions d'euros en 2017. Cette continuité doit cependant s'accompagner d'une amélioration dans la consommation des crédits ouverts, car, s'agissant du programme 104, l'enjeu budgétaire réside autant dans l'exécution des crédits que dans leur ouverture.
En matière d'intégration, Stella Dupont et moi-même appelons également de nos voeux différentes adaptations destinées à améliorer l'intégration professionnelle des demandeurs d'asile et des réfugiés. Nous avons présenté récemment un rapport sur ce sujet et nous espérons que le Gouvernement retiendra certaines des propositions que nous avons formulées, notamment concernant les formations linguistiques du contrat d'intégration républicaine.
Je conclurai en soulignant que le budget proposé est tout à fait satisfaisant même si, au strict plan budgétaire, le recours à la mission « Plan de relance » pour financer certaines dépenses nous laisse dubitatifs. Je remercie Laurent Delrieu pour son travail et je félicite les rapporteurs pour avis pour la qualité de leurs rapports.
Stella Dupont et moi-même vous appelons donc à confirmer l'adoption des crédits décidée en commission des finances et à voter en faveur des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».