Intervention de Pierre-Henri Dumont

Séance en hémicycle du jeudi 5 novembre 2020 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Immigration asile et intégration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Henri Dumont, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères :

Plus de 400 000 étrangers sont ainsi légalement arrivés dans notre pays en 2019 ; 3,5 millions y vivent. Nous étions donc en droit d'attendre un budget « Immigration, asile et intégration » ambitieux dans le projet de loi de finances pour 2021, mais ce n'est pas le cas : pour la première fois depuis cinq ans, les crédits de cette mission diminuent de 8,82 % en autorisations d'engagement et la légère hausse de 2 % des crédits de paiement ne repose quant à elle que sur une augmentation mécanique des sommes dévolues à l'asile. La réalité est simple : ce budget n'est pas à la hauteur de la situation migratoire en France. En effet, alors qu'un budget doit être l'instrument de l'exécution d'une politique, ce gouvernement n'a toujours pas répondu clairement à la question de savoir s'il veut plus ou moins d'immigration en France. Refusant de répondre à cette simple question, il fait subir au pays la loi des trafiquants d'êtres humains, qui deviennent les réels décideurs de notre politique migratoire.

Il existe pourtant des moyens pour une reprise en main. Le premier d'entre eux ne se chiffre pas, mais se mesure : il s'agit du courage politique – or vous en manquez. Notre système d'asile, qui fait l'honneur de la France, devient désormais hors de contrôle et donc inefficace. La demande d'asile dans notre pays a doublé en cinq ans et nous enregistrons 20 % des demandes d'asile européennes. En un an, les demandes d'asile ont augmenté de près de 10 % en France alors qu'elles diminuent partout ailleurs : 30 % de nos demandeurs ont déjà été déboutés ailleurs en Europe. Plus de 10 % proviennent d'Albanie ou de Géorgie, pays dont vous avez autorisé les ressortissants à venir en France sans visa. La conséquence est directe : malgré les renforts alloués à l'OFPRA pour traiter ces demandes, le système est embolisé. Alors que l'objectif était de traiter les demandes d'asile en deux mois, il en faut désormais neuf pour statuer – durée à laquelle il faut ajouter les sept mois d'appel auprès de la CNDA, la Cour nationale du droit d'asile. Seize mois pour finalement débouter les demandeurs, c'est inacceptable !

C'est inacceptable car cela prive les vrais demandeurs d'asile de la protection effective de la France. Inacceptable, car cela fait peser sur les finances publiques une charge supplémentaire. Inacceptable, car 10 % des places ouvertes dans nos dispositifs d'accueil sont occupées par des personnes qui n'ont rien à y faire, obligeant d'autres demandeurs à dormir dans des camps. Inacceptable, enfin, car cela ne permet pas d'expulser celui qui n'est pas protégé. La réalité de notre système d'asile, c'est que le demandeur n'a pas le choix entre la protection et l'expulsion, mais entre être protégé et devenir clandestin en France, renforçant ainsi la cohorte du demi-million – au bas mot – de ceux qui vivent déjà dans notre pays. En 2021, les montants versés au titre de l'aide médicale d'État franchiront la barre symbolique du milliard d'euros, bénéficiant à près de 40 % d'étrangers en situation irrégulière de plus qu'en 2012.

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