Intervention de Stéphane Viry

Séance en hémicycle du jeudi 5 novembre 2020 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Travail et emploi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Viry :

Je commencerai par souligner le soutien budgétaire apporté à la mission « Travail et emploi », dont les crédits connaîtront en 2021 une hausse de quasiment 3 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2020. C'est sur un budget de près de 13,7 milliards d'euros que cette mission pourra compter. Plusieurs crédits du plan de relance concernent aussi cette mission et pour des raisons de lisibilité de l'action publique, je déplore que la cohabitation de deux budgets distincts empêche d'avoir une vision d'ensemble des crédits disponibles pour la consolidation et l'accès à l'emploi, l'adaptation de notre économie et de nos entreprises ou encore l'amélioration de la valeur du travail. Ce manque de complémentarité entre les deux budgets est regrettable. Cependant, je note les efforts faits en faveur du financement du travail des personnes en situation de handicap et leur accompagnement ainsi que de l'emploi des jeunes et leur accompagnement à travers les crédits du programme 102.

La situation est telle que le plein emploi est devenu un objectif inaccessible, au point de rendre durablement caduque une des promesses républicaines de l'emploi pour tous. Les chiffres inquiétants du chômage publiés le 28 octobre dernier par Pôle emploi illustrent cette faille sociale : au troisième trimestre 2020, 5,7 millions de personnes sont à la recherche d'un emploi en France métropolitaine. La deuxième vague de l'épidémie de covid-19 et les mesures sanitaires qui y sont liées auront des conséquences sur l'emploi, qu'il nous faut dès à présent anticiper pour en éviter les pires effets.

Madame la ministre, la France ne saurait se résigner à un chômage de masse et à un chômage de longue durée et je déplore que le budget 2021 ne soit pas davantage tourné vers cet objectif. Il nous faut désormais aller de l'avant pour lutter contre cette fracture sociale qui s'aggrave de semaine en semaine et qui mine la cohésion nationale.

S'agissant du dispositif « territoires zéro chômeur longue durée », je me réjouis que la commission mixte paritaire ait réussi à trouver un consensus pour permettre sa prolongation et son extension. S'appuyant sur l'exemple de cet outil d'accès à l'activité professionnelle, les pouvoirs publics devraient prendre des initiatives destinées à créer des emplois à domicile et d'aide à la personne, tels que les auxiliaires de vie et les aides à domicile. Du fait du vieillissement de la population, de l'allongement de l'espérance de vie ou du choix du maintien à domicile, les besoins sont croissants. Dans ce secteur d'activité, des solutions de travail nouvelles sont à inventer à partir de moyens budgétaires dédiés.

Dans cet hémicycle, nous entendons souvent parler du monde d'après. Ce nouveau modèle de vie intégrerait une forme de souveraineté économique et reposerait sur une indépendance retrouvée du pays. C'est une bonne orientation qui nécessite cependant de se préparer. Cela implique de renouveler et de développer les industries manufacturières et les emplois dédiés. Or je constate qu'il n'y a aucune idée neuve sur ce sujet. La réindustrialisation de la France est essentielle mais il n'y a dans cette mission budgétaire aucun élément spécifique pour soutenir la mutation économique de notre tissu industriel et développer l'emploi industriel.

Toujours dans cette optique du monde d'après, la France doit résolument faire le choix des emplois liés aux transitions, notamment en stimulant l'économie sociale et solidaire génératrice de nouvelles situations de travail et de nouveaux emplois. Madame la ministre, dans cette mission budgétaire, où sont les crédits destinés à encourager ces emplois ?

Par ailleurs, je regrette que les maisons de l'emploi ne soient pas accompagnées par ce projet de loi de finances. Elles constituent pourtant des lieux fédérateurs et accélérateurs de l'action des partenaires publics et privés en faveur de l'économie de proximité au plus près des potentiels des bassins d'emploi. C'est un véritable acteur de l'emploi qui est ainsi mis de côté par le Gouvernement. Je note toutefois qu'un amendement nous a permis d'aller de l'avant, mais il appartenait, selon moi, au Gouvernement de prendre l'initiative.

Vous l'avez compris, madame la ministre, face au défi du chômage, il nous faut des crédits, certes, mais aussi des idées neuves. Lors de votre audition devant la commission des affaires sociales, vous avez dit vouloir encourager les nouveaux dispositifs favorisant l'insertion professionnelle. Vous avez raison. Il y a des expérimentations à développer en ce sens au sein des territoires, en prenant en compte les différents bassins de vie et les forces vives de notre pays. La France compte environ 1,3 million d'associations et ce tissu associatif peut être un acteur majeur de l'insertion des bénéficiaires du RSA – revenu de solidarité active – et des chômeurs de longue durée. Nous pourrions mettre en place des dispositifs d'insertion par la vie associative allant au-delà de ce qui existe déjà.

Enfin, parfaire le suivi des demandeurs d'emploi est une exigence. Les agents de Pôle emploi sont compétents et remarquables : ils ont su répondre présent au moment de la crise sanitaire en poursuivant leur travail d'accompagnement mais ils sont aujourd'hui démunis face au chômage de longue durée et aux situations humaines qui en résultent.

Voici, madame la ministre, mes chers collègues, les quelques observations que je voulais formuler sur ce projet de budget de la mission « Travail et emploi », sur lequel, en l'état, le groupe Les Républicains s'abstiendra.

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