Intervention de Béatrice Descamps

Séance en hémicycle du vendredi 6 novembre 2020 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Médias livre et industries culturelles ; avances à l'audiovisuel public

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBéatrice Descamps :

« Ouvre un livre. [… ] Il détruit l'échafaud, la guerre, la famine ; il parle, plus d'esclave et plus de paria. » Ces quelques mots de Victor Hugo sont sans conteste et plus que jamais d'actualité.

Ils le sont d'abord en ces jours où les ennemis de notre pays et de notre civilisation ont encore frappé des innocents ; ces crimes ignobles renforcent mon envie de transmettre notre culture et notre art, dont la beauté nous unit. Ils le sont ensuite car la tourmente liée à la crise sanitaire nous prive de nouveau de l'accès direct à la culture – librairies, cinémas, théâtres, salles de concert.

J'entends, madame la ministre, et je comprends que des décisions sanitaires doivent être prises, ce qui nécessite de faire des choix plus que cornéliens. Mais ce seront malheureusement les géants du web qui en profiteront et, à l'approche des fêtes, on ne peut que le regretter. Je souhaite malgré tout inviter nos collègues et nos concitoyens à se tourner vers les librairies faisant de la vente à emporter ou celles qui se sont réunies pour mettre en place un système de livraison. Il faut mettre en valeur de tels dispositifs dans cette période difficile, et je tiens à dire combien nous apprécions l'annonce du Gouvernement concernant la prise en charge des frais d'expédition.

Cependant, pour en revenir à la mission « Médias, livre et industries culturelles », le groupe UDI et indépendants salue l'augmentation de son budget, et notamment la pérennisation de certaines aides pour la presse.

Nous nous réjouissons particulièrement qu'une partie de ces aides concerne plus spécifiquement les territoires et l'outre-mer. Comme vous l'avez dit en commission, le secteur de la presse connaissait déjà de nombreuses difficultés avant la crise sanitaire, qui n'a évidemment pas amélioré sa situation. Près de 289 millions d'euros sont prévus dans le plan de relance pour lui venir en aide, mais il sera nécessaire de s'interroger sur les problèmes structurels du secteur, qui ne pourra indéfiniment être aidé.

Particulièrement attentive à l'accessibilité des lieux de savoir et de la culture, je souhaite vous interroger, madame la ministre, sur l'accès au livre et aux bibliothèques dès le plus jeune âge. Dans ce domaine, la fracture sociale et territoriale reste très visible. Quelles actions votre ministère pourrait-il entreprendre pour y remédier ?

Concernant l'audiovisuel public, j'ai entendu vos commentaires en commission, alors que nous étions plusieurs à revenir sur le rôle crucial joué par la chaîne France 4 durant le confinement. J'entends, bien sûr, que nous ne pouvons faire une chaîne pour les crises, et que les pratiques des plus jeunes évoluent en matière d'audiovisuel, mais je ne suis pas certaine que les pratiques numériques soient aussi répandues que vous l'avez laissé entendre dans certains milieux, les plus défavorisés, où les familles ne disposent pas d'autant d'écrans que d'enfants. Quoi qu'il en soit, comme vous l'avez dit, une réflexion doit s'ouvrir à ce sujet.

L'industrie française du cinéma, déjà fragilisée par la crise, subit une nouvelle catastrophe financière qui touche les exploitants, les distributeurs et les gérants, du fait de la fermeture des salles annoncée jusqu'au 1er décembre. L'État et le CNC restent à son chevet, et votre récente annonce concernant l'aide de 30 millions d'euros dédiée au septième art témoigne de la volonté d'appui de l'État. Cependant, madame la ministre, une vraie question demeure : ouverture, fermeture, carnet de chèques, ce triptyque permettra-t-il de sauver les industries culturelles à long terme ? Les vocations, dans le domaine de la culture, ne sont-elles pas en danger ?

Quant au CNM, sa montée en puissance le transforme en guichet renforçant ses fonds de sauvegarde et de compensation des jauges. Il a distribué plus de 50 millions d'euros, et la très grande majorité de cette manne bénéficie aux PME, TPE et entrepreneurs de musiques actuelles. Une enveloppe de 2 millions d'euros a été destinée à la musique classique, mais je m'interroge sur le fait que l'aide accordée à ce secteur soit moins conséquente que pour les autres, alors qu'il représente bien souvent 60 à 120 personnes par orchestre.

Comme vous le voyez, nous gardons de nombreuses interrogations qui retiendront notre attention. Toutefois, nous abordons les débats dans un état d'esprit favorable.

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