Finalement, qu'avez-vous dit à nos compatriotes ? Que vous vouliez opposer aux mythes fanés du vieux monde les rythmes, la couleur d'un monde nouveau dont vous auriez les clefs ; qu'il y aurait dans cette confrontation quelque chose de fécond ; que le clivage entre anciens et modernes était désormais le seul pertinent et qu'il devait remplacer celui, dépassé, entre la gauche et la droite ; qu'il n'y aurait plus rien entre un hypercentre progressiste et des périphéries dangereuses. Mais le progressisme n'appartient à personne : ni à vous ni à moi. Chacun peut s'en revendiquer ; ses contours sont aussi flous que ceux de la modernité. Qu'est-ce que le progrès ? Qu'est-ce qui est moderne ? La pensée écologiste est venue interroger utilement ces notions. La nouveauté n'est pas toujours le progrès ; elle porte une part d'artifice et d'illusion. Gardons-nous donc de la fuite en avant qui substituerait à l'alternance entre la gauche et la droite une alternance entre le neuf et le vieux, car viendra un jour où le neuf prendra l'apparence du monstre et où ce sera au nom de valeurs séculaires que nous devrons, ensemble, le repousser.