Intervention de Nicolas Forissier

Séance en hémicycle du samedi 7 novembre 2020 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Économie ; investissements d'avenir ; engagements financiers de l'État

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Forissier, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

La situation du commerce extérieur français est évidemment inquiétante. La baisse de nos exportations, due notamment à la crise de l'aéronautique, devrait atteindre 18,5 % en 2020, soit 7 points de plus que la baisse de nos importations. Notre déficit commercial, qui s'est déjà alourdi de 5 milliards d'euros, devrait s'accroître de 10 milliards supplémentaires pour atteindre 70 milliards à la fin de l'année. Cette dégradation aura d'ailleurs des conséquences directes pour les finances publiques, puisque l'assurance crédit gérée par Bpifrance assurance export, dispositif traditionnellement très créditeur et très rentable pour l'État, pourrait être déficitaire de plusieurs dizaines de millions d'euros en 2021.

Dans ce contexte, monsieur le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance – j'ai eu l'occasion de le dire à M. Le Maire en commission – , le volet export du plan de relance est bienvenu. En ma qualité de rapporteur spécial, je demande depuis des années que l'on mette 200 millions d'euros sur la table pour doper et structurer le dispositif public d'appui aux PME et TPE à l'export. Or le Gouvernement va lui attribuer 247 millions d'euros de crédits de paiement sur deux ans, dont 122 millions en 2021. Je tiens à saluer cette décision.

À rebours d'un recroquevillement derrière nos frontières, idée que nous avons un peu entendue au printemps, il importe de poursuivre l'effort d'accompagnement de nos entreprises dans la conquête de marchés à l'export, car l'emploi repose sur ce déploiement. À la fin de l'année 2019, la tendance était très positive. La mise en place de la Team France export – TFE – , notamment, a été très utile, du point de vue de tous les acteurs ; je tiens à mon tour à la saluer. Mais le confinement a entraîné, bien évidemment, un ralentissement très fort. Il convient donc de maintenir l'effort. Tel est le sens du volet export du plan de relance, volet que je soutiens très clairement, bien que je siège sur les bancs de l'opposition.

Je rappelle les trois principaux outils offerts par le plan de relance. Je pense d'abord au chèque export, qui coûtera 33 millions d'euros et permettra de financer 15 000 prestations, notamment des participations à des salons. Nous savons que les salons sont l'outil principal et prioritaire auxquels recourent les PME et TPE pour aborder l'exportation sur les marchés internationaux. Si les régions jouent le jeu – c'est le cas d'un certain nombre d'entre elles, notamment Auvergne-Rhône-Alpes – , alors il va devenir très facile et très peu coûteux pour les PME et TPE de participer à un salon. Cette mesure nous mettra au même niveau que l'Italie ou l'Allemagne, qui soutiennent fortement les salons destinés aux PME.

En ma qualité de rapporteur spécial, j'insiste sur la nécessité de comparer notre dispositif public d'appui à l'export avec ceux des pays concurrents. Je souhaite, monsieur le ministre délégué, que l'administration poursuive le travail de benchmarking qu'elle a engagé ces dernières années. Si nous ne savons pas ce que font nos concurrents, nous serons tout simplement moins bons qu'eux ! Nous devons en outre mesurer et comparer les efforts consentis par les différents conseils régionaux en matière de soutien aux PME à l'export, en complément du dispositif national et du plan de relance mis en oeuvre par l'État.

La deuxième mesure importante est le chèque VIE – volontariat international en entreprise – , qui permettra de soutenir à hauteur de 5 000 euros l'envoi par les entreprises de jeunes à l'étranger. Elle coûtera environ 17,4 millions d'euros.

Enfin, il est prévu de relever de 52 millions d'euros le budget de l'assurance prospection, ce qui permettra de financer 1 500 assurances prospection par an pendant trois ans, notamment des « assurances prospection accompagnement », formule simplifiée et beaucoup plus directe qui sera proposée aux PME. Il s'agit là encore d'un très bon moyen de soutenir les petites entreprises à l'export.

Mes chers collègues, je souhaite insister sur trois points. Premier point : l'effort que j'ai mentionné – 247 millions sur deux ans, dont 122 millions en 2021 – était nécessaire et attendu ; il sera très utile, mais il faut qu'il soit durable. Nous devons être conscients que, du fait notamment du reconfinement, les salons ne vont pas reprendre toute de suite et les entreprises ne vont pas envoyer immédiatement des jeunes en VIE à l'étranger. Dès lors, la consommation de ces crédits sera moindre ou plus lente que prévu. Il ne faudrait pas pour autant que l'effort décidé par le Gouvernement soit rogné par les mécanismes budgétaires que nous connaissons bien ici. Il convient de maintenir ces 247 millions d'euros, pour garantir le soutien au commerce extérieur.

Il faut également maintenir au même niveau l'effort budgétaire destiné à Bpifrance assurance export, afin que celle-ci puisse financer dans la durée, au-delà du plan de relance, l'outil de l'assurance prospection, notamment les assurances prospection accompagnement.

Deuxième point : cet effort budgétaire ne doit pas se faire trop longtemps au détriment des moyens des opérateurs du commerce extérieur. Business France réalise en ce moment d'importantes économies sur ses fonds propres et sur sa gestion interne, afin d'assumer les pertes de recettes qu'il a subies cette année à cause du confinement. Cela ne va pas pouvoir durer indéfiniment.

D'une manière générale, monsieur le ministre délégué, vous devrez veiller à ce que nos opérateurs aient les moyens de financer la politique sur laquelle ils se sont engagés. Je pense notamment aux chambres de commerce et d'industrie, qui ont signé avec l'État des contrats d'objectifs et de moyens comprenant un volet très précis relatif à l'export. Compte tenu de la baisse de leurs recettes, il faudra que nous soyons très attentifs à leurs ressources budgétaires, afin qu'elles puissent maintenir leur effort.

Troisième et dernier point : il est urgent d'apporter une réponse aux chambres de commerce et d'industrie françaises à l'étranger – je vous ai écrit à ce propos, monsieur le ministre délégué. Ce sont des organismes privés, qui relèvent non pas du droit français mais du droit local.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.