Le rapport que je présente aujourd'hui porte sur deux comptes d'affectation spéciale – CAS – et un compte de concours financiers, ce dernier n'ayant aucune incidence sur le déficit et la dette au sens du traité de Maastricht.
Le compte d'affectation spéciale relatif aux participations financières de l'État comporte deux programmes. Un autre, nouvellement créé – le 358 – , et relevant de la mission « Plan de relance », a également trait à l'accompagnement financier d'entreprises.
Comme je le rappelle tous les ans, nous n'avons pas de prise sur ce véhicule budgétaire, car si nous votons les recettes et les dépenses qui lui sont attachées, le montant des crédits de ce CAS reste purement indicatif. Depuis sa création en 2006, nous votons environ 5 milliards d'euros de recettes et de dépenses – cette année, le chiffre sera supérieur – , mais ces montants sont en réalité fictifs, car le Gouvernement ne souhaite pas, et je le comprends, communiquer d'informations aux marchés sur les cessions qu'il envisage de réaliser.
Quoi qu'il en soit, pour 2021, le Gouvernement propose 12,8 milliards d'euros de recettes, lesquelles proviennent, pour l'essentiel – 11 milliards d'euros – du budget de l'État. En effet, nous avions voté, lors du PLFR2 pour 2020, l'allocation de 20 milliards d'euros de crédits pour la restructuration d'un certain nombre d'entreprises. Sur cette enveloppe, 9 milliards d'euros ont déjà été consommés, le reste allant donc abonder le compte d'affectation spéciale pour 2021. Sur les 9 milliards d'euros utilisés en 2020, 3 milliards ont été consacrés à Air France, 4 milliards à la SNCF, 1 milliard à EDF et 150 millions à l'aéronautique.
S'agissant des dépenses, la somme de 13,3 milliards d'euros est envisagée. Ces fonds devraient être affectés, dans leur quasi totalité, au renforcement des entreprises fragilisées par la crise du covid-19 – orientation à laquelle j'adhère.
En revanche, monsieur le ministre délégué, je regrette que le Gouvernement n'ait pas précisé, dans les documents budgétaires, les critères sur lesquels seront répartis ces 13,3 milliards d'euros destinés au soutien des entreprises. La décision sera-t-elle prise suivant les secteurs d'activité, ou encore leur lieu d'implantation sur le territoire ? L'ampleur des fonds propres disponibles sera-t-elle déterminante ? Je déplore que nous ne disposions pas de ces informations, même si je renouvelle mon adhésion à l'objectif global du soutien aux entreprises fragilisées par le covid-19.
Permettez-moi également de vous indiquer que je ne comprends pas pourquoi, sur cette enveloppe de 13,3 milliards d'euros, 100 millions devraient être consacrés au désendettement de la France. Je ne suis pas opposée au désendettement de la France, mais cette somme de 100 millions d'euros ne représente que 0,004 % de notre dette. Il me semblerait donc préférable qu'elle soit utilisée pour soutenir des PME ou d'autres entreprises et je présenterai un amendement en ce sens.
Lors du printemps de l'évaluation, je reviendrai sur le rôle de l'État actionnaire, s'agissant notamment des décisions relatives à Engie ou encore à la privatisation du groupe ADP – Aéroports de Paris – , que nous sommes parvenus à stopper grâce au référendum d'initiative partagée et aux 1,2 million de Français qui l'ont soutenu.
Mais je souhaite évoquer dès à présent la question des dividendes issus des titres que l'Agence des participations de l'État – APE – détient et qui sont directement versés au budget de l'État. Depuis la création de l'APE en 2006, l'État lui a reversé la somme de 33,8 milliards d'euros, or le total théorique des dividendes s'élève à 88,3 milliards d'euros, ce qui signifie que ce sont 54,5 milliards d'euros de recettes qui sont venus contribuer au solde budgétaire de la France.
Pour 2020, ces dividendes devraient s'élever à 300 millions d'euros, alors que, pour 2021 leur montant devrait atteindre 1,1 milliard d'euros. Or, monsieur le ministre délégué, il me semble que le Gouvernement a demandé aux entreprises de ne pas verser de dividendes pendant la crise. Pouvez-vous donc nous dire à quoi correspond ce 1,1 milliard d'euros ?
Le second compte d'affectation spéciale dont je suis rapporteure spéciale est celui de la participation de la France au désendettement de la Grèce. En effet, pour mémoire, la Grèce paye des intérêts à la Banque de France, que nous lui rétrocédons ensuite. Or, comme l'accord passé avec la Grèce n'a pas été entièrement respecté, une décision européenne nous impose de cesser ces rétrocessions. Le gouvernement français n'est ici pas mis en cause – il ne fait qu'appliquer strictement une décision européenne – , mais nous détenons 800 millions d'euros destinés à la Grèce dans nos caisses : je trouve regrettable que nous améliorions de facto quelque peu notre déficit sur le dos de ce pays.
S'agissant enfin du compte de concours financiers « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics », il nous permet de verser des avances sur les crédits que nous recevons. Il est abondé, chaque année, à hauteur d'environ 11 milliards d'euros, montant qui correspond peu ou prou à la politique agricole commune – 10 milliards. Or, en 2021, vous prévoyez de mobiliser ce compte pour allouer encore 760 millions d'euros au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » – BACEA – , après avoir déjà crédité celui-ci de sommes très importantes en 2020.
La commission des finances a donné un avis favorable à l'ensemble des crédits de ces deux comptes d'affectation spéciale et de ce compte de concours financiers, et ce malgré mes réserves sur les CAS « Participations financières de l'État » et « Désendettement de la Grèce », particulièrement sur l'utilisation des 13,3 milliards d'euros destinés aux entreprises.