J'interviens une nouvelle fois au nom de Marie-Noëlle Battistel.
Le Gouvernement a souhaité faire de la transition écologique un axe majeur de la seconde moitié du quinquennat. Cette intention devait se traduire d'une part par la loi du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat, d'autre part par la convention citoyenne sur le climat. Si cette dernière n'a toujours pas produit d'effets concrets, qui semblent renvoyés aux calendes grecques, la démarche législative, pour sa part, a abouti.
Durant l'examen de ce texte, nous n'avons pas toujours été d'accord avec notre rapporteur, Anthony Cellier, sur les moyens. Cependant, la convergence a bien eu lieu concernant les objectifs, notamment l'inscription dans la loi de l'urgence écologique et climatique ou encore la neutralité carbone du parc de logements en 2050 et l'élimination des passoires thermiques en dix ans. Un an plus tard, notre déception est grande face au manque de moyens déployés par le Gouvernement.
En tant que rapporteure pour avis, j'ai pris acte de l'effort exceptionnel engagé en faveur de l'hydrogène, qui ouvre d'importantes perspectives au secteur du transport, pourvu que nous arrivions rapidement à ce que l'hydrogène vert soit économiquement viable. Cependant, le bâtiment demeure la première source de consommation énergétique : il en représente 40 %, dont les trois quarts pour le seul logement. Or force est de constater que dans ce domaine, entre les efforts annoncés, la réalité des chiffres et l'état des besoins, il subsiste des écarts considérables.
La rénovation énergétique des logements connaît deux freins majeurs : d'une part la complexité des aides et des procédures, d'autre part le reste à charge pour certains ménages. Sur le premier point, vous faites un pas dans la bonne direction, en regroupant la plupart des aides au sein du dispositif MaPrimeRénov'. Vous avez également entendu la demande que nous formulons depuis deux ans, d'élargir ce dispositif aux propriétaires bailleurs et à l'ensemble des déciles.
Toutefois, au lieu d'accroître les moyens budgétaires en même temps que le nombre des bénéficiaires, vous avez fait le choix inverse : rogner le montant des aides. Ainsi, vous avez procédé en juillet au durcissement des règles d'éligibilité d'après le règlement de l'Agence nationale de l'habitat, l'ANAH : vous limitez à 100 mètres carrés la surface de murs isolés éligible, ce qui correspond à un logement de 47 mètres carrés en moyenne, alors que la surface moyenne des logements anciens est de 80 mètres carrés. Il y a là une véritable incohérence.
Vous avez également ramené le plafond d'aide de 75 à 60 euros au mètre carré pour les ménages modestes, de 100 à 75 euros pour les ménages très modestes, ce qui risque de briser l'effet levier du dispositif. En augmentant de fait leur reste à charge, vous ne parviendrez pas à créer la dynamique nécessaire pour atteindre les objectifs de rénovation : nous en reparlerons l'an prochain.
Les travaux menés par l'association négaWatt ainsi que par l'Institut de l'économie pour le climat, et nos propres travaux préparatoires à notre proposition de loi portant création d'une prime pour le climat, estiment entre 6 et 7 milliards d'euros par an le budget nécessaire, à l'exclusion de tout autre financement, pour que le niveau des subventions permette d'atteindre l'objectif de 500 000 rénovations par an. Ce chiffre constitue lui-même un minimum si nous voulons espérer respecter l'échéance de 2050.
Même si les dotations consacrées à la politique énergétique progressent en 2021 sous l'effet du plan de relance, elles restent très insuffisantes. Entre la fraction 2021 du plan de relance et les crédits de MaPrimeRénov', on atteint péniblement 1,7 milliard pour l'année prochaine, soit – je l'ai déjà dit – le niveau du crédit d'impôt pour la transition énergétique en 2015 et 2016. C'est moins que les 2 milliards de dépenses fiscales du CITE en 2018 ; c'est même beaucoup moins que les 2,6 milliards mobilisés en 2009 et en 2010 dans le cadre du précédent plan de relance économique ! Si nous nous fondons sur le coût moyen d'une rénovation complète et performante, vos crédits permettront d'en financer moins de 200 000 : nous voilà loin de l'objectif de 500 000 logements rénovés par an, et plus loin encore des besoins, évalués à 750 000 rénovations par an.
Madame la ministre, nous ne pouvons répondre à l'urgence écologique et climatique en dépensant moins qu'il y a dix ans pour la transition énergétique du logement. S'agissant de la prime de conversion et du bonus écologique, en revanche, il y a du mieux. Pour 2021, le plan de relance prévoit d'affecter à la prime de conversion 1,3 milliard d'autorisations d'engagement et 732 millions de crédits de paiement : c'est une bonne nouvelle. Cependant, si la mission « Plan de relance » assure un réel effort, la mission qui nous intéresse aujourd'hui voit baisser de 36,4 %, soit 290 millions, ses crédits consacrés aux aides aux mobilités durables.
Eu égard à tout ce que je viens d'évoquer, le groupe Socialistes et apparentés votera contre les crédits de cette mission. J'aurais en outre aimé aborder le sujet du chèque énergie : j'espère que notre amendement à ce propos recevra votre agrément, madame la ministre.