J'interviens peut-être de manière décalée et je m'en excuse, mais la situation est très compliquée. Le rapporteur et le ministre tiennent des propos de bon sens que je partage : il va de soi que, dans la grande majorité des cas, les policiers nationaux constatant une situation d'ivresse publique ont la volonté de protéger l'individu concerné, y compris contre lui-même, et ils le font avec humanité. Étendre cette faculté aux policiers municipaux, comme vous l'avez proposé puis accepté, et même aux gardes champêtres, auxquels je suis très attaché, peut donc sembler de bon sens.
Une fois de plus, néanmoins, j'appelle l'attention des collègues sur le fait – dont nous reparlerons très vite – que graver ces dispositions dans le marbre de la loi aura l'effet suivant : dans les six mois suivant l'entrée en vigueur du texte, les commissaires de police, dont les priorités pourront évoluer d'ici là, en fonction de la menace terroriste par exemple, se délesteront de cette tâche. Le ministre le dit d'ailleurs clairement, à juste titre : quand on amène un gars bourré à l'hosto, ça prend des heures, d'autant que c'est aux urgences hospitalières que se traite la misère du monde. De fait, pendant que les policiers attendent à l'hôpital le résultat de l'examen médical, ils ne sont pas sur le terrain, et c'est votre préoccupation, monsieur le ministre.
Ainsi, vous dites aux maires que les agents de police municipale qu'ils emploient devront se rendre à l'hosto, notamment la nuit, car c'est pendant la soirée que se constate la majorité des situations d'ivresse publique. En clair, c'est un transfert de charges massif aux dépens des collectivités locales. Or je répète que cette proposition de loi ne prévoit pas de compensation financière et que les collectivités se trouveront embouteillées par un transfert de missions qui pèsera sur leur quotidien. Vous ne répondez pas à cette question, c'est préoccupant.