Entrons dans le détail de ce que changera le nouveau délit créé par ce texte. Jusqu'à présent, lorsqu'un individu jette un policier en pâture sur les réseaux sociaux, la poursuite se fait a posteriori. Vous ne pouvez pas interpeller quelqu'un a priori pour ce motif. Il faut caractériser l'infraction – la diffusion a eu lieu – , transmettre le dossier au parquet, qui engage des poursuites et, éventuellement, défère la personne concernée en citation directe ou en comparution immédiate, dans le meilleur des cas.
Que permettra la nouvelle infraction ? Vous le savez comme moi, monsieur le ministre. Elle permettra aux policiers et aux gendarmes de terrain, dans une situation de maintien de l'ordre ou autre, d'interpeller, sur leur propre appréciation, une personne qu'ils jugent en train de porter atteinte – « manifestement » ou pas, peu importe mais prenons cette hypothèse pour coller à votre texte – à leur intégrité physique, ce qui sera difficile à prouver, et psychique – beaucoup plus simple. En effet, ils pourront arguer du fait que dès lors qu'ils ne souhaitent pas que leurs visages soient largement exposés sur les réseaux sociaux, il est porté atteinte à leur intégrité psychique, un point c'est tout. C'est sur la base de ce simple fait qu'une personne pourra être interpellée et placée en garde à vue pendant une durée pouvant aller jusqu'à quarante-huit heures – puisque le délit que vous créez est puni d'une peine d'un an d'emprisonnement.
Pourquoi craignons-nous cette disposition ? Parce que c'est déjà le modus operandi utilisé, sur la base d'autres dispositions du code pénal, par certains policiers dans les manifestations. Que s'est-il passé mardi dernier ? Au motif qu'il se tenait un attroupement après sommation, les journalistes présents ont été interpellés et placés en garde à vue.