Nous abordons la nouvelle lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 dans un contexte fortement marqué par l'épidémie de covid-19.
Ce PLFSS repose cette année plus que jamais sur des fondations précaires, minées par de nombreuses incertitudes liées à la crise sanitaire.
Ces incertitudes portent d'abord sur une potentielle campagne de vaccination, pour laquelle 1,5 milliard d'euros sont pour l'instant inscrits au budget. Alors que plusieurs laboratoires publient des résultats prometteurs et que nos voisins semblent se préparer activement à vacciner au moins une partie de leur population, rien n'a été précisé par le Gouvernement concernant l'envergure et les objectifs qu'une telle opération aurait en France, ni sur les publics prioritaires à cibler ou sur le caractère obligatoire ou non de la vaccination. Cela nous empêche d'estimer de manière précise et réaliste le coût de cette campagne.
L'incertitude porte ensuite sur la nature du budget de la sécurité sociale, les équilibres des comptes sociaux ayant été modifiés au gré des évolutions de la pandémie et des mesures adoptée pour y répondre.
Depuis le début de l'examen de ce texte, les évolutions de la crise sanitaire, le couvre-feu et le reconfinement ont conduit à des réévaluations d'envergure des prévisions budgétaires initiales. Entre la première lecture à l'Assemblée et celle au Sénat, les crédits destinés à faire face à la crise sanitaire ont ainsi augmenté de 800 millions d'euros. C'est une nouvelle réponse conjoncturelle, face à une crise qui révèle pourtant les failles structurelles de notre système de santé. C'est d'ailleurs par l'absence de réponse apportée à la crise durable que connaît ce système que votre texte est le plus décevant.
Les symptômes, nous les connaissons tous : l'hôpital public est à l'agonie, et la qualité des soins apportés aux Français s'est nettement dégradée.
La crise sanitaire a creusé la dette de la sécurité sociale en raison des dépenses de santé supplémentaires qu'elle provoque et de la réduction des recettes qu'engendre le ralentissement de l'activité économique. Mais vos décisions y ont puissamment contribué, puisque vous faites peser sur les comptes sociaux le coût des exonérations de cotisations que vous avez consenties. Ce faisant, vous appauvrissez notre système de protection sociale, alors que vous devriez au contraire le renforcer pour faire face à la pandémie.
Alors que les exonérations de cotisations se sont multipliées à l'occasion des deux confinement successifs, l'État, une fois de plus, ne compensera pas à la sécurité sociale la dette que ses choix politiques lui font supporter, au mépris de la loi Veil de 1994. L'adoption, au Sénat, d'un amendement permettant de corriger en partie cette forfaiture constitue à cet égard une avancée importante, et nous espérons que la mesure sera maintenue à l'issue de cet examen.
L'enjeu du présent PLFSS est de répondre à la crise sans grever les capacités de notre système de protection sociale. Ces deux objectifs doivent être poursuivis de pair. Or la réponse apportée à la crise épidémique risque d'affaiblir durablement la sécurité sociale.
La crise des hôpitaux ne date pas de la covid-19 ; notre système de santé est à bout de souffle. Aussi faut-il apporter une solution de long terme à la crise des hôpitaux publics, soutenir efficacement nos soignants, ouvrir des lits, recruter des personnels supplémentaires. Ces mesures sont urgentes, incontournables, quoi qu'il en coûte.
Si plusieurs dispositions de ce projet de loi viennent récompenser la mobilisation des soignants, il convient de souligner que le Ségur de la santé en oublié beaucoup – je pense en particulier aux professionnels des SIAD, les services infirmiers de soins à domicile.
Par ailleurs, rien n'est fait pour soulager efficacement la souffrance des hôpitaux publics ; des lits continuent de manquer, les services en sous-effectif sont légions, et le matériel fait parfois défaut.
Dans ces conditions, exiger de l'hôpital public 800 millions d'économies en 2021 revient à affaiblir sciemment la qualité des soins de tous les Français. De même, instaurer un forfait obligatoire de 18 euros pour chaque passage aux urgences, c'est condamner la santé des plus précaires. Cette privatisation progressive des urgences va conduire de nombreux citoyens parmi les plus pauvres, déjà largement affectés par la crise, à renoncer aux soins.
Sans surprise, le groupe Socialistes et apparentés maintiendra ses exigences lors de cette nouvelle lecture, et plaidera pour un système de soins juste, égalitaire, ouvert à tous et efficient.
Il est impératif de se mobiliser pour les hôpitaux publics et les soignants, afin de répondre efficacement à leurs besoins, comme à ceux de nos concitoyens.