Depuis notre île européenne, la Corse, nous observons la Guyane avec intérêt, non parce que ce serait un objet exotique, fascinant – c'est là le regard que l'on rencontre trop souvent chez certains métropolitains en quête d'évasion, et on peut le déplorer – , mais parce que les Guyanais forment un peuple, avec toutes ses composantes, même s'il est difficile de le reconnaître. En effet, en l'absence de modification de la Constitution, ce constat expose à être taxé injustement de communautarisme, au nom de l'unicité du peuple français.
Revenons au présent texte. Il ne vise pas, on l'aura compris, à modifier le mode de scrutin pour l'élection des conseillers à l'assemblée de Guyane – un scrutin proportionnel de liste à deux tours, dans le cadre d'une circonscription unique divisée en huit sections électorales. Nous connaissons bien ce système, qui permet la représentation des différents courants politiques, parce qu'un mécanisme similaire est en vigueur en Corse, qui est aussi une collectivité unique depuis 2018. Pour éviter les risques de blocage institutionnel en Guyane, une prime majoritaire a été prévue, ainsi qu'un seuil de prise en compte des listes pour la répartition des sièges, fixé à 5 % des suffrages exprimés dans la circonscription.
Comme on le sait, le code électoral fixe le nombre de sièges de conseiller à l'assemblée de Guyane en fonction de la population et dispose que ce nombre passe de cinquante et un à cinquante-cinq dès lors que la population dépasse 249 999 habitants, puis de cinquante-cinq à soixante et un si elle dépasse 299 999 habitants. Le premier seuil a été franchi, puisque l'INSEE estime que la population guyanaise est de 290 691 habitants. En raison de l'augmentation du nombre total de conseillers, l'article L. 558-3 du code électoral précise qu'il faut réviser le nombre de sièges attribués à chaque section.
La proposition de loi va cependant plus loin et c'est une bonne chose. En effet, elle tend à inscrire dans la loi les règles de calcul qui président à la répartition des sièges entre les sections et qui déterminent le nombre de sièges résultant de la prime majoritaire. Alors que le droit en vigueur prévoit que onze sièges sont attribués à la liste arrivée en tête, quel que soit l'effectif total de l'assemblée, la proposition de loi tend à substituer à ce chiffre une règle de calcul fixant la prime majoritaire à 20 % du nombre total de sièges. Le code électoral indiquerait cette seule règle de calcul, et ne préciserait plus la répartition des sièges concernés par section. Le nombre de sièges octroyés au titre de la prime majoritaire et leur répartition par section, selon la population légale de chacune d'elles, devront donc être déterminés par un arrêté préfectoral, suivant les règles définies par la loi. Il ne sera ainsi plus nécessaire de modifier la loi à chaque franchissement de seuil.
Compte tenu de la grande vitalité démographique du territoire guyanais, cette solution proposée par notre collègue Lénaïck Adam est bienvenue. Le groupe Libertés et territoires votera donc en faveur de ce texte.