En pratique, la mise en conformité du droit français avec les standards de la lutte contre le dopage ne va pas de soi dans le cadre d'un calendrier parlementaire particulièrement surchargé cette année. En effet, cette tâche exige une certaine technicité, au regard des implications multiples que comportent les changements apportés au code mondial.
Je ne décrirai pas ici l'intégralité des modifications apportées au dispositif établi par la Conférence de Katowice, en Pologne, en novembre 2019. Mais nous pouvons retenir que la rédaction applicable à compter du 1er janvier prochain marque un approfondissement des principes et une certaine sophistication des procédures.
Ainsi, sur le plan des substances et des produits interdits, la dernière version du code mondial se caractérise, pour l'essentiel, par une certaine stabilité des qualifications relatives aux méthodes spécifiées, ainsi qu'aux substances et produits interdits. La véritable novation du dispositif adopté réside dans la création d'une nouvelle catégorie de substances : les substances d'abus.
Dans la définition des infractions au code mondial antidopage, le dispositif applicable au 1er janvier 2021 comporte des reformulations et des précisions. Il en va ainsi pour la définition de la falsification de tout élément du contrôle du dopage de la part d'un sportif ou d'une autre personne. De même, la nouvelle rédaction du code mondial révise les conditions nécessaires à la sanction de l'association interdite.
Au-delà, je crois que chacun sera sensible au fait que le code mondial accorde une protection nouvelle aux personnes qui dénoncent une violation des règles antidopage – je parle des lanceurs d'alerte. Les pressions ou représailles exercées à leur encontre pour ce motif reçoivent désormais la qualification d'infraction.
Sur le plan des sanctions en cas de violations alléguées, le code mondial procède, il est vrai, à un alourdissement des sanctions encourues pour certains faits tels que la complicité et au rétablissement de circonstances aggravantes.
En définitive, l'évolution du régime des sanctions manifeste le souci de mieux prendre en considération les circonstances et les profils. J'en veux pour preuve des stipulations qui ouvrent aux contrevenants la possibilité d'obtenir ce qui peut s'assimiler à des réductions de peine pour certaines infractions : c'est le cas, d'une part, pour la soustraction à un contrôle antidopage, le refus de s'y soumettre ou une falsification, et, d'autre part, pour les sanctions prévues en cas de consommation de substances d'abus.
On trouvera une autre illustration de cette volonté d'un traitement pragmatique des infractions dans la place plus significative accordée à des procédures qui, à des degrés divers, allègent le prononcé des sanctions en contrepartie d'une coopération des contrevenants ou d'une reconnaissance des infractions alléguées. Je fais ici référence à l'extension du champ d'application de l'aide substantielle, à la réduction de la durée d'interdiction pour aveu rapide et acceptation des conséquences, ou encore à la création des accords de règlement de l'affaire. En dernière instance, le code mondial pousse la logique jusqu'à établir des régimes de sanctions assouplies. Dans sa rédaction applicable à compter de 2021, il prévoit plusieurs tempéraments au régime des sanctions encourues pour certaines infractions au bénéfice de deux catégories nouvelles : les personnes protégées, c'est-à-dire les mineurs, et les sportifs de niveau récréatif.
En matière de contrôles antidopage et de recueil des informations à cette fin, le dispositif présente des inflexions plus notables. Ainsi, le code mondial actualisé se signale par l'affirmation du principe de la nécessaire indépendance des laboratoires à l'égard de toute organisation antidopage, aux plans administratif et opérationnel. Cette stipulation nous fait l'obligation d'établir l'indépendance organique du Laboratoire national de dépistage du dopage – LNDD – à l'égard de l'AFLD. Sachez que cette indépendance est déjà amorcée.
Une autre inflexion significative réside dans la capacité nouvelle des organisations nationales antidopage à recueillir des informations sur la localisation des sportifs qui ne sont pas inclus dans un groupe cible.
Il convient de souligner l'élargissement du champ des enquêtes des organisations nationales antidopage à l'entourage des sportifs. La nouvelle rédaction du code mondial impose, en l'occurrence, de mener des investigations sur l'implication potentielle de membres du personnel d'encadrement des sportifs ou d'autres personnes dans chaque cas de dopage.
Sur le plan de la coordination des acteurs de la lutte contre le dopage, le code mondial comprend des stipulations de nature à conforter le rôle et les responsabilités des organisations antidopage. Dans son nouveau dispositif, il impose en effet à tout signataire d'adopter des règles obligeant chacune de ses organisations membres et toute autre organisation sportive relevant de sa compétence à respecter, appliquer, maintenir et exécuter le code. Sur le principe, le dispositif tend à renforcer la position de l'AFLD vis-à-vis des fédérations sportives.
En dernier lieu, le code mondial antidopage réaffirme la nécessaire indépendance des organisations antidopage dans leurs décisions et activités opérationnelles vis-à-vis du milieu sportif et du Gouvernement.
À l'évidence, la transposition du code mondial antidopage emporte des conséquences et des obligations de portée très diverse, mais extrêmement nombreuses.
Devant la commission des affaires culturelles et de l'éducation, j'ai qualifié le recours à l'article 38 de notre Constitution d'expédient procédural, conforme à l'esprit de nos institutions mais aussi raisonnable. Je veux redire ici que l'objectif d'une transposition rapide du code mondial antidopage ne dispense pas le Parlement de demeurer très vigilant quant aux mesures que le Gouvernement prendra sur la base de l'habilitation.
C'est dans cet esprit que je présenterai deux amendements : le premier vise à parfaire la définition du champ de l'ordonnance à venir ; le second réaffirme la nécessaire conciliation entre, d'une part, les exigences du code mondial antidopage et, d'autre part, la préservation des principes constitutionnels et conventionnels qui prévalent sur le territoire national.
Pour conclure, je vous appelle, mes chers collègues, à faire vôtre la position de la commission des affaires culturelles et de l'éducation en votant en faveur de l'adoption du présent projet de loi et, je l'espère, une nouvelle fois, à l'unanimité.