Le risque que l'eco CEDEAO ne soit qu'un avatar du naira, la monnaie nigériane, est d'autant plus élevé que le Nigeria plaide pour un abandon de la parité à taux fixe avec l'euro, au profit du recours à un panier de monnaies. Concrètement, une telle opération aurait pour effet d'accroître l'instabilité monétaire de la zone – je pense notamment aux pays en situation de conflit comme le Mali ou le Burkina Faso.
Si le débat sur une monnaie unique est légitime et nécessaire afin d'accélérer l'intégration régionale, il ne saurait se suffire à lui-même. En effet, la mise en commun de la monnaie ne se fera qu'à condition que des relations commerciales se nouent au sein de la zone. Or le taux d'intégration en la matière n'est que de l'ordre de 15 % pour la région, contre 60 % pour l'Union européenne, et le développement d'une industrie de transformation des matières premières reste hétérogène.
Si des économies importatrices et reposant principalement sur l'activité touristique, comme le Sénégal, peuvent se satisfaire d'une monnaie forte, tel n'est pas le cas de pays dont l'économie dépend de matières premières, comme la Côte d'Ivoire, pourvoyeuse de cacao, dont la compétitivité repose sur une monnaie faible. La convergence des économies de la zone constitue un préalable indispensable à la mise en commun de la monnaie. L'instauration de critères macro-économiques portant sur le déficit public, l'inflation ou encore la dette apparaît incontournable.
Ainsi, le succès de cette réforme dépendra des choix politiques cruciaux qui seront effectués par les seuls responsables des États. Néanmoins, et afin de garantir leur acceptation par les parties prenantes, il est indispensable de faire précéder cette décision de consultations et d'échanges associant les agents économiques, les intellectuels et les opinions publiques.