Nous voici de nouveau réunis pour voter la prorogation de l'état d'urgence sanitaire, non parce que nous le voulons, mais bien parce que le contexte l'impose. L'ensemble du pays est en état d'alerte constant et, depuis samedi dernier, le couvre-feu est avancé à dix-huit heures. Nous savons qu'il est vécu parfois comme une punition et que cette énième privation de liberté a des conséquences terribles sur le moral des Françaises et des Français. Nous le savons et nous légiférons en connaissance de cause, et en responsabilité.
Hier, 23 608 personnes supplémentaires ont été contaminées par le covid-19 ; 10 328 ont été hospitalisées, dont 1 517 en réanimation, et 373 personnes sont décédées. Je tiens d'ailleurs, au nom du groupe La République en marche, à exprimer nos pensées les plus solidaires à l'intention des victimes, des malades, de leurs proches et de leurs familles, à tous nos concitoyennes et concitoyens qui vivent de vrais drames au quotidien. Je tiens également à saluer l'engagement constant de tous nos personnels soignants.
Dans ce contexte, les mesures difficiles et douloureuses que nous prenons visent d'abord à éviter la saturation de nos services de réanimation, à éviter une charge trop importante, car déjà considérable, de nos personnels soignants, à éviter que la France ne connaisse trop de décès, bref, à sauver des vies, je tiens à le rappeler.
Pour la sixième fois depuis le mois de mars 2020, nous nous retrouvons dans cet hémicycle afin de débattre de l'opportunité de proroger l'état d'urgence sanitaire. Contraignant, mais indispensable et nécessaire, il permet de disposer d'un arsenal juridique à la hauteur des réponses à apporter à la crise sanitaire. Il offre un cadre d'actions conforme au respect de nos institutions et de notre Constitution.
Le projet de loi comporte des mesures qui résultent d'un impératif de santé. Nous ne pouvons pas aujourd'hui, même si nous le souhaitons, sortir de cet état d'urgence sanitaire. Le virus est toujours très actif, de nouveaux variants commencent à se diffuser en France, alors même que nous débutons seulement la campagne de vaccination : une campagne qui permettra de vacciner 1 million de concitoyens d'ici à fin janvier, 2,4 millions d'ici à la fin du mois de février. Cette campagne sera longue en raison du rythme de fabrication des doses de vaccin, dont nous dépendons.
J'en viens au fond du texte. L'article 1er du projet de loi vise à proroger jusqu'au 31 décembre 2021 le régime juridique de l'état d'urgence sanitaire, qui devait initialement prendre fin 1er avril 2021. L'article 2 proroge quant à lui l'état d'urgence sanitaire en vigueur jusqu'au 1er juin 2021. Au risque de me répéter avec le rapporteur et mes collègues du groupe La République en marche, ces deux premières dispositions sont adaptées et proportionnées au contexte sanitaire.
Si nous soutenons ces deux prorogations, nous restons néanmoins très attentifs à ce que le Parlement prenne toute sa place dans la gestion de la crise et exerce son rôle de contrôle de l'action du Gouvernement – d'autant que cela fera bientôt un an que nous sommes plongés dans cette crise dramatique.
C'est pourquoi, lors de la réunion de la commission des lois intervenue la semaine dernière, nous avons supprimé l'article 3 qui prorogeait le régime transitoire de sortie de l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 30 septembre 2021. Même si ce régime est très utile, nous l'avons pleinement constaté l'été dernier, et même si nous soutenons pleinement l'action du Gouvernement au quotidien, nous ne pouvions vous donner un blanc-seing jusqu'à cette date : nous créons, de facto, une clause de revoyure, qui permettra au Gouvernement de se présenter de nouveau devant le Parlement à la fin du printemps, afin de nous faire part des décisions que nous devrons prendre, collectivement, à ce moment donné.
L'article 4 proroge jusqu'au 31 décembre 2021 les systèmes d'information SIDEP – système d'information national de dépistage populationnel – et Contact covid, deux dispositifs indispensables dans la lutte quotidienne contre le virus. Je salue à ce sujet la décision prise par le Gouvernement d'en fixer la date de caducité par la loi et non par décret. Enfin, l'article 5 étend les dispositions qui le nécessitent aux collectivités d'outre-mer.
Ce projet de loi, mes chers collègues, n'est pas une surprise, à partir du moment où la décision avait été prise de reporter l'examen du projet de loi instaurant un régime pérenne de gestion des crises sanitaires, texte par ailleurs fondamental dont nous débattrons avant la fin de cette année. Face à l'absence de régime pérenne, nous ne pouvons pas jouer aux apprentis sorciers et mettre en danger la santé ou la vie de nos concitoyens : nous devons proroger le dispositif d'urgence, tel que nous l'avons créé le 23 mars dernier à l'unanimité. Je sais que les décisions que nous prenons aujourd'hui ne sont pas anodines ; elles sont, au contraire, empreintes de gravité. Nous souhaitons à toutes et tous la même chose : sortir de cette crise et retrouver une vie normale. Mes chers collègues, je suis certain que nous y arriverons. J'espère simplement que chacune et chacun, malgré l'approche des élections départementales et régionales, saura participer de manière responsable à sa gestion sans rechercher en permanence la polémique, sans chercher à ajouter de la colère à l'impatience légitime qui existe dans le pays.