La séparation stricte entre l'État et les religions est la condition de l'unité du pays. La force et la tentation de la force ont toujours existé, mais elles sont une erreur. Celui qui vous le dit est un admirateur de la grande Révolution de 1789, qui commit l'erreur de vouloir faire jurer un serment de fidélité à la République à des gens qui, de toute façon, n'en conviendraient jamais et se sont organisés contre elle – non pas à cause de ce serment, mais à cause de toutes les raisons sociales qui les conduisaient à cette position. Voilà un souvenir qu'il ne faut jamais écarter de notre mémoire. Il ne sert à rien que le pouvoir politique cherche à organiser les religions. Dire cela ne revient pas à manifester de la sympathie pour une religion ou une autre en tant que contenu philosophique ou spirituel ; c'est dire ce que l'histoire nous a appris. Or si elle nous l'a appris, et que nous avons déjà payé assez cher cet enseignement, ne recommençons pas à notre façon – plus tempérée, j'en conviens – l'erreur que fit le roi en décidant qu'il convertirait tout le monde de force au christianisme, ce qui conduisit aux dragonnades et aux guerres incessantes contre les protestants.
Avant eux, ce sont les juifs qui, pendant mille ans, avaient été persécutés dans notre pays. Oui, mille ans, parfaitement ! À Toulouse, ils ont même dû un jour racheter le droit de ne pas être giflés une fois par an. Ils avaient auparavant été expulsés à douze reprises du royaume de France par les rois ! Et celui que vous appelez Saint Louis – je me demande bien pourquoi – , c'est-à-dire Louis IX, fut le premier à leur imposer le signe distinctif de la rouelle et à brûler des exemplaires du Talmud – et non des exemplaires de la Thora comme on me l'avait fait remarquer un jour, alors que je me trompais. La belle affaire ! Que l'on brûle des exemplaires du Talmud ou de la Thora est également insupportable !
Tout ceci est dans l'histoire de France. Personne n'en est coupable sur ces bancs. L'histoire est là, déployée sous nos yeux. Que choisissons-nous de faire, quelles leçons en tirons-nous ? Voilà les questions que nous devons nous poser, à cette tribune et ailleurs.
Prenons l'exemple du foulard, qui a l'air d'obséder une grande partie d'entre vous. Le foulard serait symbole de soumission.