Intervention de Olivier Falorni

Séance en hémicycle du lundi 1er février 2021 à 16h00
Respect des principes de la république — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Falorni :

Une motion de rejet préalable ayant été déposée, mon intervention s'inscrira dans ce cadre et se substituera à celle prévue dans la discussion générale. Elle ira donc au-delà d'une simple explication de vote et visera à exprimer une position sur le projet de loi.

La position que j'exprimerai à cette tribune sera au moins celle d'une composante de notre groupe Libertés et territoires : celle des radicaux de gauche, ce centre gauche profondément laïc et républicain, dont le combat historique pour les valeurs de la République n'est plus à démontrer, et qui est l'héritier des grands fondateurs radicaux de la IIIe République. C'est tout à l'honneur de notre groupe de respecter et de permettre la diversité et la pluralité de nos points de vue sur ce texte.

Ce projet de loi a commencé par un symbole. En choisissant la date du 9 décembre pour sa présentation en conseil des ministres, le Gouvernement disait sa volonté de s'inscrire dans la lignée de la loi de séparation des Églises et de l'État de 1905. La référence était manifeste. Elle n'est d'ailleurs pas pour me déplaire, bien au contraire. Jouer sur l'analogie, c'est aussi prendre le risque de la comparaison.

Nous savons que la loi de 1905, adoptée après d'intenses débats qui ont marqué l'histoire de cet hémicycle, fut au final une très grande loi – pour moi, la plus belle de toutes : 115 ans après son adoption, elle demeure une loi fondamentale autant que fondatrice, une loi qui, pour reprendre les termes du Conseil d'État, constitue la « clé de voûte de la laïcité », laquelle est devenue à son tour la clé de voûte de la République.

La laïcité, c'est en effet l'âme et la flamme de la République, le magnifique trait d'union entre ce qui nous est si précieux : la liberté, l'égalité et la fraternité. La liberté d'abord, car la laïcité, c'est la construction de l'autonomie, de la personnalité et de l'esprit critique, notamment à l'école, grâce à l'apprentissage des matières et disciplines scolaires. C'est aussi la mise à distance des assignations identitaires. C'est enfin un droit précieux, particulièrement apprécié des enfants venus de pays où l'on est d'abord défini par son origine et par sa religion : la laïcité, c'est aussi le droit d'être différent de ses différences. L'égalité ensuite, car la laïcité, c'est la commune appartenance à la nation et le partage de la citoyenneté – de ses droits comme de ses devoirs. La fraternité enfin, car la laïcité, c'est privilégier ce qui nous rassemble plutôt que ce qui nous sépare.

Oui, la laïcité est un joyau de paix et de concorde. Elle n'est pas un glaive, elle est un bouclier. Et puisqu'elle nous protège, nous devons nous aussi la protéger. Or, depuis au moins trente ans, la laïcité n'a pas été suffisamment défendue et ses défenseurs n'ont pas été assez entendus. Elle est bien sûr frontalement attaquée par les prêcheurs de haine, accompagnés de quelques idiots utiles qui crient à l'islamophobie, quand il s'agit d'universalisme. Mais le plus inquiétant, peut-être, est que la remise en cause de la laïcité prend moins souvent la forme d'une contestation frontale que celle d'une édulcoration sournoise. Les adjectifs dont certains affublent le mot « laïcité » – laquelle devrait être ouverte, inclusive, positive… – sont des parasites qui, tels une tique, ne se fixent sur ce substantif que pour mieux le vider de sa substance. Depuis des années, les accommodements, les renoncements, les petites et grandes lâchetés et les aveuglements volontaires se sont accumulés dans l'espoir d'acheter la paix sociale.

L'aveuglement volontaire, ce fut par exemple la mise sous le tapis du rapport Obin qui, dès 2004, alertait sur les graves atteintes à la laïcité dans l'école de la République. Ce fut également la création de l'Observatoire de la laïcité, lequel ne fut, en réalité, qu'un observatoire de la cécité.

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