Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du mercredi 15 novembre 2017 à 13h15
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics :

Plusieurs députés m'ont interrogé concernant les OPEX et Sentinelle. Je commencerai par répondre à M. Saint-Martin. La loi de finances initiale pour 2017 avait prévu 450 millions d'euros de crédits. Le décret d'avance de juillet en a ajouté 650 millions et le décret d'avance de fin d'année, 300 millions. Cela fait au total 1,4 milliard d'euros, à la fois pour les OPEX et pour Sentinelle, soit à peu près 100 millions d'euros de plus que ce qu'on attendait en juillet.

Monsieur Vigier, nous essayons de sincériser les OPEX. Nous avons ainsi rajouté 200 millions d'euros de crédits dans le PLF 2018. Nous le ferons chaque année. Indépendamment de l'augmentation sans précédent du budget de l'armée, nous souhaitons, avec la ministre des armées, sincériser chaque année les OPEX en en prenant une part dans le cadre du budget. Bien sûr, ces besoins dépendent beaucoup du coût des opérations, des théâtres sur lesquels nous sommes présents, des décisions internationales et de celles du Président de la République.

Nous faisons, monsieur de Courson, un très important travail de sincérisation budgétaire. Je peux comprendre que nous n'en fassions jamais assez mais les décrets d'avance comme celui de cet été sont assez rares, de même qu'il est assez rare de rétablir la sincérité du budget comme nous le faisons. Nous allons peu à peu sincériser le budget des OPEX et essaierons de faire en sorte que les dépenses militaires soient financées par le budget des armées. Cela ne veut pas dire que le budget des armées n'augmente pas par ailleurs, bien au contraire : je rappelle qu'il y aura l'an prochain 200 millions d'euros supplémentaires pour les OPEX et 1,8 milliard, pour l'intégralité du budget de l'armée.

Monsieur Hetzel, je ne suis pas un spécialiste de la géothermie. Je ne pense pas qu'il soit souhaitable de revenir sur ce que prévoit de faire le Gouvernement mais puisque vous semblez interroger la méthode retenue plutôt que le fond, je vous propose de venir avec les élus locaux de votre circonscription me voir à Bercy, en lien avec les cabinets ministériels concernés. Nous verrons alors ce que nous pouvons faire pour modifier le texte, si jamais nous trouvons un compromis.

La charge de la dette a été évoquée par Mme Peyrol et par M. le président de la commission. En 2017, les 0,3 milliard d'euros supplémentaires s'expliquent par une baisse de 0,4 milliard d'euros en lien avec les taux d'intérêt et par une augmentation de 0,7 milliard d'euros en lien avec l'inflation. Nous restons prudents – nous aurons l'occasion de reparler dans l'hémicycle de la dette et de ses perspectives. J'ai bien entendu les propos du président Woerth, nous préférons cependant ne pas jouer avec les chiffres. Il y a certes une légère différence entre l'optimisme et le volontarisme mais nous essayons d'avoir la plus grande sincérité budgétaire possible.

Le besoin de financement de l'Union européenne baisse de 10 milliards d'euros : 8 milliards d'euros du budget de cohésion n'ont pu être dépensés par certains pays de l'Est, notamment au titre des infrastructures, et 2 milliards d'euros au titre du produit des amendes perçues. La France finançant 15 % du budget européen, l'économie est pour nous de 1,5 milliard d'euros. Cela ne se reproduira sans doute pas et peut-être même devrons-nous contribuer davantage au budget de l'Union européenne dans le futur.

Des questions ont été posées concernant la DCRTP. Si le ministre d'État n'a pas pu apporter de réponse, c'est que nous y travaillons. Je vous ai promis d'y revenir en deuxième lecture avec le rapporteur général.

Monsieur Alauzet, concernant les engagements en grande partie non financés par le gouvernement précédent – et en particulier par le ministère de Mme Royal –, le secrétaire d'État Sébastien Lecornu a déjà répondu : 75 millions d'euros de crédits sont ouverts. L'effort est très important même s'il ne couvre pas toutes les demandes. L'élu de Tourcoing que je suis a ainsi reçu un courrier dans lequel le Gouvernement lui indiquait ne pas pouvoir financer la crèche à économie positive de la commune. Vous constaterez donc qu'il n'y a pas de favoritisme. J'entends que cela pose des difficultés. Nous allons en régler une partie grâce à cette ouverture de crédits. Il appartiendra sans doute au ministère de la transition écologique et solidaire de voir avec les parlementaires comment adapter au mieux les projets des territoires avec les exigences budgétaires. Peut-être y aura-t-il moyen de trouver un compromis. J'entends bien que ces TEPOS présentent un intérêt particulier dans les territoires ruraux mais ce n'est pas à moi de vous présenter la stratégie du ministère de la transition écologique. Nous faisons déjà un effort conséquent puisque, de mémoire, il n'y avait que 400 millions d'euros de crédits budgétisés sur les 750 millions annoncés et assortis parfois d'engagements écrits de l'État.

Votre seconde question concernait la fraude et l'évasion fiscale, ce qui me permet aussi de répondre à M. Coquerel. La DGFiP est une administration complexe, divisée en de très nombreux services. Les moyens humains alloués au service du contrôle fiscal et de la lutte contre la fraude sont maintenus et aucun poste n'y sera supprimé. La fermeture du service de traitement des déclarations rectificatives (STDR) donnera lieu à des redéploiements d'effectifs intégralement destinés à la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale. Je ferai à ce sujet trois remarques. Tout d'abord, le renseignement fiscal doit être approfondi, notamment grâce à une meilleure utilisation des données disponibles. Il faut pour cela que l'administration fiscale continue à se moderniser pour que les data puissent nous aider à mieux utiliser les ressources de la DGFiP, en lien avec les douanes et Tracfin. Il convient ensuite de veiller à ce que l'évasion et la fraude fiscales caractérisées, qui sont internationales, n'échappent pas à l'attention du contrôleur fiscal, même s'il dispose de moyens supplémentaires. L'ancien gouvernement a beaucoup oeuvré, en signant des conventions internationales, pour que le renseignement international soit effectif. Il est d'ailleurs fort heureux que le scandale actuel ne touche pas l'administration française, c'est pourquoi je remercie l'ancien gouvernement et l'administration d'avoir mené une action particulière en ce domaine. Enfin, on peut, comme vous, monsieur Coquerel, être choqué par l'optimisation fiscale mais dans ce cas, c'est la loi qu'il faut faire évoluer car cette optimisation est souvent légale. M. Alauzet comme le groupe La République en Marche ont des projets d'amendements sur la fraude et l'évasion fiscales, auxquels le Gouvernement a déjà donné un avis favorable de principe. Nous serons évidemment tout aussi favorables aux autres amendements déposés sur le sujet, à condition qu'ils soient réalistes.

En ce qui concerne le prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu, la préfiguration de l'année 2018 permettra un rodage du dispositif avant sa mise en oeuvre opérationnelle. Ce prélèvement à la source « à blanc » aidera toutes les collectivités et tous les employeurs. Nous avons retenu plusieurs conclusions du rapport de l'Inspection générale des finances (IGF) et prévu un assouplissement des sanctions, notamment en cas de modulation erronée ainsi que la prise en compte du cas spécifique des gérants et associés et de celui des revenus imposés selon les règles applicables aux traitements et salaires mais ayant la nature de bénéfices non commerciaux. Sont également prises en compte les questions du foncier et du crédit d'impôt. Enfin, nous avons élaboré un dispositif de communication beaucoup plus efficace que celui qui était prévu, même si beaucoup de moyens ont déjà été mis en place. Si, dans le courant de l'année prochaine, votre commission souhaite auditionner les personnes chargées du sujet au sein de l'administration fiscale, elles sont évidemment à votre disposition. Il s'agit de faire en sorte que cette nouvelle démarche, importante pour l'ensemble des Français, soit une réussite.

Pour répondre à la question de M. le président de la commission, il ne faut pas confondre la masse salariale et les effectifs. L'évolution de la masse salariale s'explique non seulement par le GVT mais aussi par l'augmentation de la valeur du point d'indice.

Nous avons déjà évoqué les emplois dans le cadre de l'examen du PLF, madame Louwagie. L'idée du Gouvernement est de répondre à des besoins très importants en matière de sécurité, d'encadrement et de justice. Votre groupe réclame parfois la création de nouvelles places de prison. Or, je rappelle qu'il faut à peu près un emploi par place de prison créée. Nous avons décidé de freiner les dépenses de personnel puisqu'il y a eu, de mémoire, 14 000 créations d'emplois au cours des deux dernières années du quinquennat précédent, qu'il n'y en a eu aucune en 2017 et qu'au total, moins de 5 000 emplois sont supprimés. Nous avons annoncé qu'une fois publié le rapport du Comité Action publique, nous regarderions quelles missions seraient concernées. Vous avez donc raison de dire qu'en 2017, l'effort d'économies fourni n'est que tendanciel et qu'il ne correspond pas à celui que vous souhaitez.

S'agissant de la Corse, vous connaissez les débats quasiment mieux que moi, monsieur Castellani. Je sais que le travail se poursuit avec le ministère de l'intérieur. Nous aurons l'occasion, tant dans le cadre du PLF que du PLFR, de revenir sur cette délicate question corse, d'autant que des élections se profilent. Chacun conviendra de la mauvaise rédaction des PLF précédents et du PLF actuel sur le sujet.

Enfin, nous pourrons débattre de la fiscalité des entreprises situées dans le bassin minier de Meurthe-et-Moselle mais je ne voudrais pas sous-estimer les difficultés des autres territoires de la République. Dans le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais, il y a eu 1 million de suppressions d'emplois en quinze ans. Je ne dis pas qu'il faut mettre en concurrence les territoires en difficulté mais les faits sont là. Aider les territoires industriels comme les territoires ruraux par des dispositifs d'exonération fiscale coûte très cher. Sans doute faut-il par conséquent le faire sur la base de critères permettant d'éviter la différenciation entre territoires. Le débat parlementaire pourrait être l'occasion d'identifier ces critères. La différence entre votre territoire, monsieur Paluszkiewicz, et la région des Hauts-de-France est que les départements du Nord et du Pas-de-Calais et d'autres collectivités de la région ont mis beaucoup de leur poche pour que les entreprises bénéficient de ces exonérations. Je suis prêt à discuter avec vous et avec les élus de votre territoire mais encore faut-il que tout le monde apporte sa contribution. J'ajoute que ces zones franches sont limitées dans le temps, l'idée étant que les territoires reviennent in fine à un modèle économique fonctionnant comme ailleurs.

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