Intervention de Alexis Corbière

Séance en hémicycle du jeudi 4 février 2021 à 15h00
Respect des principes de la république — Article 2

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlexis Corbière :

Vous connaissez nos critiques vis-à-vis de ce texte. On aurait pu espérer que, face aux piétinements de la laïcité, notre débat aurait permis de clarifier certaines situations, mais je constate que ce ne sera pas le cas.

L'adverbe « gravement », en l'occurrence, fait écho, selon moi, à l'interdiction dans le contrat d'engagement républicain du prosélytisme dit « abusif ». Toutes ces marges d'interprétation sont subjectives : qu'est-ce qu'un prosélytisme abusif ? qu'est-ce qu'une atteinte grave à la laïcité ? Tout cela, le débat ne permet pas de le définir. On évoque les piscines sans préciser de quoi on parle. Chacun sait que le débat sur la prétendue communautarisation de la pratique sportive est ouvert mais il mérite d'être précisé, car il existe aussi des femmes qui pratiquent la natation de la plus normale des manières.

En somme, rien n'est précisé ! Ce texte continuera d'ouvrir la voie aux marges d'interprétation, à la subjectivité. Or il renforce les pouvoirs administratifs du préfet – c'est l'un des reproches que nous lui faisons, monsieur le ministre. Dès lors qu'il appartiendra au préfet d'apprécier ce qui est abusif et ce qui est grave, les interprétations varieront selon les cas, selon les périodes, selon les gouvernements, selon le culte, etc. , sans rien régler ! Cette question est au coeur du désaccord que nous avons avec vous au sujet de ce projet de loi. C'est un texte prolixe mais qui ne résout aucun problème ; il restera mi-chèvre mi-chou, sans trancher aucun des grands débats que nous avons eus et en autorisant des marges d'interprétation subjectives, donc soumises au traitement enflammé de tel ou tel sujet par les médias. Enfin et surtout, du point de vue du citoyen, il ne clarifie en rien le principe de laïcité.

J'en veux pour preuve, monsieur Houlié, que, tout en défendant cette disposition en l'état, vous rappelez que trois départements n'appliquent pas le principe de laïcité et qu'il ne faut pas toucher à cet état de fait car il est l'héritage de l'histoire ! Ce sont 3 millions de personnes qui vivent dans un territoire ou une série de principes sont bafoués, et ce ne serait pas grave !

Vos arguments sont à géométrie variable et le seront encore lorsque je vous demanderai que les élus cessent de participer à des cérémonies religieuses : vous me répondrez que cela dépend des cas et que les élus font ce qu'ils veulent. Nous ne réglerons rien, le citoyen n'y comprendra rien et pourra même avoir l'impression que ceux qui parlent de laïcité, plus ils en parlent, moins ils la pratiquent !

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