Intervention de Géraldine Bannier

Séance en hémicycle du vendredi 5 février 2021 à 9h00
Prorogation de l'état d'urgence sanitaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGéraldine Bannier :

La question de la prorogation de l'état d'urgence sanitaire aurait pu déboucher sur un consensus entre l'Assemblée nationale et le Sénat ; tel n'a pas été le cas, et nous le regrettons. Les discussions ont notamment achoppé sur la date de fin de l'état d'urgence sanitaire et du régime d'état d'urgence sanitaire, même si la CMP avait avancé sur ce dernier point. Le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés comprend les interrogations nées de la prolongation d'une telle restriction de certaines de nos libertés, comme celles d'aller et venir après 18 heures, d'entreprendre, lorsqu'il s'agit des commerces, ou des activités culturelles.

Nous comprenons bien évidemment les inquiétudes liées à l'instauration d'un régime juridique d'exception, comme celui de l'état d'urgence sanitaire. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous étions opposés à l'inscription dans le droit commun de ce régime juridique, dont l'application doit évidemment rester temporaire. Cependant, nous estimons nécessaire de poursuivre ensemble le combat contre un virus que nous ne connaissions pas il y a un an, et qui évolue, avec l'apparition de nouveaux variants, dont certains, comme le brésilien, peuvent fortement amoindrir les effets du vaccin.

Il est donc de notre responsabilité de maintenir un cadre juridique adapté à une situation particulièrement erratique. Ce cadre doit être prorogé de manière proportionnée ; il ne s'agit pas, selon la comparaison très imagée du juriste allemand Fleiner, de « tirer sur les moineaux à coups de canon », mais de trouver le juste équilibre. Pour Aristote, la proportion est au coeur de la notion de juste. Des mesures restrictives des droits et libertés doivent à la fois être appropriées ou adaptées, nécessaires et proportionnées. C'est cet objectif légitime que vise ce projet de loi de prorogation de l'état d'urgence sanitaire.

Cependant, si nous partageons avec le Gouvernement cette intention, cela ne signifie pas que nous n'avons pas d'exigences. Mon collègue Philippe Latombe les a d'ailleurs énoncées à cette même tribune il y a quelques jours. L'une concerne la transparence sur les stratégies adoptées, sanitaire comme économique, sociale et culturelle ; une autre porte sur les chiffres. Nos concitoyens sont combatifs, mais pour continuer d'être résilients, ils ont besoin de savoir et de comprendre ; ils ont besoin que l'action menée par le Gouvernement soit lisible et préservée de toute cacophonie de la communication, et de rumeurs qui minent leur moral. Quant à nous, législateurs, la transparence dans les réponses à nos questions et les chiffres qui nous sont communiqués est la condition de notre efficacité.

À ce titre, je me réjouis de la semaine qui vient de s'écouler, car, je l'espère, elle ferme la porte aux incertitudes en matière de reconfinement, particulièrement fortes et anxiogènes. Entre l'intervention du Premier ministre il y a une semaine, celle du Président de la République en début de semaine, et le point presse hier soir de Jean Castex, accompagné de plusieurs ministres, les Français ont entendu de l'exécutif un discours clair, avec des points de situation réguliers.

Cette transparence était d'autant plus nécessaire que le Gouvernement a besoin du soutien de nos concitoyens, pour combattre avec eux ce virus, et du soutien du Parlement, pour disposer d'un arsenal juridique approprié. Ce projet de loi est indispensable pour permettre à l'exécutif d'agir. Comme l'étude d'impact le précise, la situation laisse craindre une potentielle nouvelle flambée de l'épidémie ; si tel n'est pas le cas pour le moment, nous observons un plateau haut, qu'il faut contenir et faire baisser. Nous le voyons, le Gouvernement doit en permanence ajuster les mesures visant à assurer la sécurité sanitaire, en fonction de l'évolution de la pandémie. Aussi doit-il pouvoir adapter les dispositions en vigueur avec réactivité et pertinence, les adopter et annoncer rapidement.

C'est pourquoi, vous l'aurez compris, le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés votera en faveur de ce texte, qui prévoit des délais adaptés, nécessaires et proportionnés. Nous notons d'ailleurs avec satisfaction l'inscription dans la loi elle-même des dispositions de l'article 4, alors qu'il avait initialement été question, avant le passage en conseil des ministres, d'un renvoi à un décret en conseil d'État. Le rôle du Parlement est ainsi conforté, ce qui nous satisfait pleinement. Il en va de même de la suppression de l'article 3 par amendement, en commission des lois de l'Assemblée nationale, qui a fait l'unanimité des groupes politiques au Parlement. Dans cette crise sanitaire inédite, nous devons continuer d'avancer ensemble, dans la même direction, avec confiance et détermination.

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