Quel problème allez-vous réellement résoudre avec cette mesure ? Ciblerez-vous ensuite les syndicats, qui sont aussi des organisations ? Peut-être y avez-vous réfléchi. Qu'avez-vous alors pensé ? Quoi qu'il en soit, votre démarche, avec ce texte et d'autres, exprime la volonté d'une société sous contrôle.
Cette mesure, dont l'efficacité reste à démontrer, a été reçue comme une mesure de défiance, portant atteinte à l'esprit de la liberté d'association. Sa formulation a été critiquée par le Conseil d'État. On ne peut pourtant accuser la loi de 1901 d'être laxiste, celle-ci étant aussi le vecteur d'une lutte résolue de la République contre les congrégations religieuses. Elle prévoit la possibilité de dissolution et indique qu'une association ne peut être fondée « sur une cause ou en vue d'un objet illicite, contraire aux lois, aux bonnes moeurs, ou qui aurait pour but de porter atteinte à l'intégrité du territoire national et à la forme républicaine du Gouvernement ». Lorsqu'une association se déclare en préfecture pour obtenir une personnalité juridique, elle entre, de fait, dans ce cadre.
Aussi le projet de loi vient-il en réalité clairement identifier les associations recevant des subventions comme des relais, si ce n'est des instruments, alors que leur projet, tout en respectant la République, n'est pas nécessairement la promotion de ses principes. J'ajoute qu'il est d'ores et déjà écrit dans la loi que toute subvention se fait sur la base de l'intérêt public. De ce fait, il est établi que les associations qui y concourent et renforcent la République par l'action de citoyens associés font oeuvre utile.
La formule que vous proposez peut donner lieu à de multiples interprétations et donc à l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire. En effet, ne vous contentant pas de rappeler au respect des principes républicains, tels que définis dans nos textes, vous les reformulez pour l'occasion. Cet engagement formel et obligatoire constitue une perte de sens.
Or nous avons besoin d'une vraie vitalité associative, car la vie associative est un pilier de notre démocratie et une déclinaison puissante de nos libertés fondamentales, qui peuvent s'exercer en commun sans altérer la liberté de chacune et de chacun. De ce point de vue, il y a matière à s'inquiéter, tant le mouvement associatif a été fragilisé par les offensives du marché, la faiblesse des politiques publiques et, parfois, le manque de confiance ou des rapports toxiques avec certaines associations.
Par le mouvement associatif, émergent des aspirations, des réponses qui viennent parfois bousculer la République pour la faire vivre. Je veux rendre hommage à ces engagements humains du quotidien, où se tisse le lien social et se construit le bien commun. Les associations ne sont pas un danger, elles sont une chance contre le repli et l'individualisation, et pour la participation et l'émancipation.