Nous avons déjà eu ce débat en commission sur l'introduction du mot « laïcité » dans le contrat d'engagement républicain et mon argumentation n'a pas changé. Bien sûr que nous partageons sans doute tous cet attachement à la laïcité, comme le montre la multiplication des chartes que vous avez soulignée, monsieur Reda ; elles montrent en effet les attentes des élus en la matière à l'égard des associations que leur collectivité subventionne ou avec lesquelles elle conventionne. Cela étant, ces chartes n'ont pas de réelle portée juridique puisqu'elles n'ont pas force de loi, et leur contenu est un peu mou. En revanche, quand on fait la loi, il faut savoir de quoi l'on parle, en l'espèce lorsqu'il est question de la laïcité. Notre collègue Moreau a rappelé à juste titre que c'est la liberté de conscience en matière religieuse, celle de croire ou de ne pas croire, mais pas seulement : c'est également la liberté de pratiquer son culte et donc la pluralité des cultes, et aussi la neutralité de l'État et des services publics. Cette définition s'explique parce que la laïcité s'applique à la République, et non pas à l'individu. On ne demande pas à celui-ci d'être laïque, mais de respecter l'État laïque, d'accepter de vivre dans une république laïque. Libre à lui de croire en ce qu'il veut ou de ne pas croire, chaque religion étant traitée de la même façon par l'État, traitée à égalité par le service public et par l'ensemble des institutions de la République.
Dès lors, étendre le principe de laïcité aux associations serait entrer dans une logique qui en ferait des institutions républicaines. Or ce n'est pas du tout l'objet d'une association, puisque celle-ci consiste en un collectif d'individus autour d'un intérêt commun – lesquels peuvent par ailleurs avoir différentes sensibilités religieuses, ou aucune. Introduire ce principe serait donc attentatoire à leur liberté de s'associer. Cette précision n'est évidemment pas contradictoire avec l'obligation pour ses membres de respecter la République laïque. Par conséquent, même si je partage pleinement l'intention des auteurs de ces amendements, je ne peux que constater que ceux-ci entrent en conflit avec la nature même des associations, dont les objectifs et les statuts peuvent, je l'ai rappelé en commission, être extrêmement divers. Ainsi, des associations complètement confessionnelles seraient interdites de subventions si un de ces amendements étaient adoptés. Je réitère donc l'avis défavorable de la commission.