La liberté d'enseignement n'est d'ailleurs pas seulement consacrée dans la Constitution française ; elle dispose également de protections dans la plupart des pays européens.
Paradoxalement, ce que vous remettez en cause va à l'encontre de ce que vous avez revendiqué en défendant vos précédents amendements. Si le Gouvernement vous suivait et supprimait le contrat d'association, ce serait une marche arrière historique, alors même que, lors des décennies précédentes, des gouvernements de gauche ont réussi l'équilibre entre le public et le privé, rétablissant la paix en France autour d'un sujet qui n'a pas toujours été un sujet pacifique. Vos propos visent à ébranler cette paix. C'est la raison pour laquelle je vous répondrai à la fois courtoisement, brièvement et sereinement, parce que ces questions méritent du calme et de la sérénité, de ne pas réveiller des polémiques complètement inutiles et en partie hors sujet. Néanmoins, je ne veux pas ne pas vous répondre, sans quoi je n'ose pas imaginer quels arguments vous allez en tirer.
Bref, si le Gouvernement allait dans le sens de ce que vous proposez, cela reviendrait à aller contre la mixité sociale dans l'enseignement privé, que vous réclamez. En effet, celui-ci ne serait plus accessible à la plupart des élèves, ce qui est, en soi, une contradiction dans les termes.
S'agissant des tendances que vous évoquez, je suis au moins aussi soucieux que vous des enjeux qu'elles soulèvent, qui excèdent largement la question de la différence entre l'enseignement public et l'enseignement privé sous contrat, puisqu'ils concernent aussi la concentration de la pauvreté sur certains territoires, comme cela a déjà été expliqué. Néanmoins, au début du quinquennat, la tendance était effectivement à une forte fuite vers le privé. Depuis trois ans, cette fuite est bien moindre, notamment en raison du choix gouvernemental de dédoubler les classes à l'école primaire et de rétablir des sections européennes et les classes bilangues au collège, où un garrot s'était installé. Les années 2015 et 2016 nous ont enseigné, avec la réforme du collège, que, lorsque l'on commence à semer le trouble par des réformes mal pensées dans l'enseignement public, on crée des fuites du public vers le privé. En revanche, lorsque l'on rend le public attractif, et que l'on évite d'importer des polémiques politiques à l'intérieur des collèges ou des lycées publics, l'attractivité est à nouveau au rendez-vous. C'est le sens de la politique que nous menons. C'est la raison pour laquelle la fuite que vous décrivez n'existe actuellement pas dans les collèges et les lycées, même si cela peut arriver sur certains territoires, et il faut alors s'interroger au cas par cas, les raisons pouvant être extérieures à l'école.
Quoi qu'il en soit, d'une façon générale, il est toujours souhaitable d'éviter d'importer les polémiques politiques à l'intérieur du collège, de l'école ou du lycée, même si malheureusement cela fait aussi partie de notre quotidien. Jean Zay, a eu une phrase fameuse sur cette question : il faut laisser les polémiques politiques aux portes de l'école. Il est normal que nous ayons des polémiques, je ne dis pas le contraire. En revanche, j'observe parfois sur le terrain que ces polémiques sont importées dans les établissements. Hier encore, un maire a fait une tentative de ce genre, que je condamne fermement, comme je condamne tout ce qui nuit à la paix scolaire.