Nous examinons ce soir la proposition de loi du groupe Socialistes et apparentés portant création d'un fonds d'indemnisation des victimes de la covid-19. Depuis près d'un an, nous découvrons chaque soir avec gravité le décompte officiel du nombre du cas confirmés et de personnes décédées des suites de la covid-19 dans notre pays. Nous y sommes tous extrêmement sensibles.
Il y a, derrière ces chiffres froids que le temps ne rend pas moins dramatiques, le visage de milliers de victimes, la douleur de leur famille et la peine de leurs proches. Il y a aussi, pour de nombreuses personnes contaminées, la persistance de séquelles plus ou moins lourdes qui bouleversent considérablement leur vie. Plusieurs mois après avoir contracté le virus, beaucoup de malades déclarent en effet ne plus pouvoir vivre comme avant, tant l'essoufflement, la fatigue ou les douleurs qu'ils éprouvent rendent difficile l'accomplissement de certains gestes du quotidien. Les différentes formes de ce que l'on appelle le « covid long » toucheraient, d'après une récente étude, près de huit malades hospitalisés sur dix. Ce syndrome concerne également des personnes ayant souffert de formes légères de la maladie : 30 % à 40 % d'entre elles présentent encore des symptômes persistants et résurgents plusieurs mois après leur infection.
Les malades de la covid-19 sont davantage susceptibles de développer des troubles psychologiques à la suite de leur contamination. Des séquelles moins connues se traduisent par un risque accru de troubles anxieux, de difficultés à trouver le sommeil voire de dépression.
Qu'elles soient physiques ou psychiques, les conséquences du virus sur la santé des personnes l'ayant contracté témoignent de la nécessité de mettre en place un accompagnement circonstancié à la hauteur des effets de la pathologie. Tel est d'ailleurs l'objet de la proposition de résolution visant à reconnaître et à prendre en charge les complications de long terme de la covid-19 de nos collègues Patricia Mirallès et Julien Borowczyk, que nous avons adoptée hier à l'unanimité. Parce qu'elle invite le Gouvernement à accélérer la recherche, donc la connaissance des complications liées à la covid-19, parce qu'elle propose d'établir un parcours de soins adapté aux personnes souffrant de séquelles persistantes et parce qu'elle vise à faciliter la reconnaissance comme maladie professionnelles des formes graves de l'infection ayant une origine professionnelle – même si le parcours pour cette reconnaissance est long – , cette proposition de résolution nous paraît préférable à la présente proposition de loi.
Nous nous interrogeons sur l'opportunité de créer une indemnité financière inspirée du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante pour répondre à une zoonose purement naturelle qui ne relève d'aucune responsabilité industrielle ou institutionnelle. Indemniser les ayants droit des personnes décédées, comme le prévoit la proposition de loi, reviendrait à reconnaître une responsabilité juridique de l'État dans la diffusion de cette épidémie, qui frappe, est-il nécessaire de le rappeler, le monde entier depuis un an.
Alors que l'attente exprimée par les malades est celle du soin et de la guérison, nous croyons qu'il est nécessaire de concentrer nos efforts sur trois points : renforcer la recherche scientifique pour étoffer notre connaissance des infections à long terme liées à cette pathologie ; informer et former le corps médical, en particulier les médecins généralistes, à la détection de ces séquelles et renforcer l'offre de soins ; enfin, adapter le parcours de soins pour mieux prendre en charge les personnes souffrant de symptômes persistants.
Ces orientations s'inscrivent dans la proposition de résolution que notre assemblée a adoptée hier. Ainsi, si le groupe Agir ensemble partage l'ambition de construire un dispositif efficace et réparateur pour accompagner les malades au long cours de la covid-19, nous sommes beaucoup plus réservés sur le calendrier choisi et sur les moyens utilisés. Nous voterons donc contre la proposition de loi.