Intervention de Danièle Obono

Séance en hémicycle du jeudi 18 février 2021 à 21h00
Fonds d'indemnisation des victimes de la covid-19 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Obono :

Le 30 octobre dernier, l'Organisation mondiale de la santé – OMS – lançait l'alerte : il est impératif que les gouvernements reconnaissent les effets à long terme de la covid-19 et garantissent un accès aux services de santé à tous les malades. Cela englobe des soins de santé primaires et, si nécessaire, des soins spécialisés et une réadaptation.

En France, depuis avril 2020, les malades de la covid-19 au long cours se retrouvent sur les réseaux sociaux et créent des associations pour échanger, comprendre leurs symptômes, essayer de trouver des solutions et faire entendre leur voix. Présidente de l'une de ces associations, AprèsJ20, et contaminée par la covid-19 en mars 2020, Pauline Oustric témoigne ainsi : « C'est une maladie prolongée, fluctuante et multi-systémique. Outre l'épuisement chronique, les symptômes peuvent être respiratoires, cardiaques, vasculaires, dermatologiques, neurologiques – le brouillard cérébral étant l'un des effets les plus rapportés – , relatifs à la sphère ORL – [… ] certains ont même perdu l'audition, d'autres la voix – , ou encore digestifs. Avant j'étais en méga-forme, très sportive. Aujourd'hui je suis obligée de fractionner mes journées à cause de fatigues invalidantes. J'ai des douleurs thoraciques, on m'a diagnostiqué une dysautonomie qui provoque notamment de la tachycardie. J'ai aussi développé des indigestions et une intolérance au lait que je n'avais pas avant. Je suis toujours gelée. Sans mes parents, chez qui je suis rentrée alors que je vivais en Angleterre, je n'aurais pas pu tenir. »

Les symptômes persistants et polymorphes de la covid-19 sont chaque jour de mieux en mieux documentés, mais ils ne sont toujours pas reconnus par les pouvoirs publics. Les malades ne devraient pas dépendre uniquement de leurs proches ou de leurs parents – quand ils en ont la possibilité. Ils doivent recevoir de la communauté nationale, pas simplement des mots, mais également des moyens pour faire face, d'autant que les séquelles qui ont été observées, comme cela a été décrit, sont nombreuses et très invalidantes. Ce soutien et ces moyens doivent absolument pouvoir être assurés à long terme.

À maintes reprises, le groupe de la France insoumise avait alerté, comme d'autres ici, sur la situation. Nous avions déposé plusieurs amendements, dont la plupart ont été jugés irrecevables, au projet de loi de financement de la sécurité sociale – PLFSS – pour 2021, ainsi qu'aux divers projets de loi portant mesures d'urgence.

Les malades atteints par ces symptômes devraient pouvoir bénéficier de la reconnaissance de la covid-19 comme maladie professionnelle, quand c'est le cas. Pourtant, le décret du ministre de la santé Olivier Véran, permettant à certains soignants et soignantes de bénéficier de cette reconnaissance, demeure réservé à celles et ceux d'entre eux qui ont été mis sous oxygène, alors que 10 à 20 % des personnes ayant contracté la covid-19 sans aller en réanimation seraient concernés par ces préjudices au long cours.

Qu'en est-il de toutes les autres ? Le ministre oublie aussi les autres maladies, les autres professions, les premiers et premières de cordée, les soignants et soignantes tombés malades et ayant développé d'autres formes de maladies. Beaucoup sont forcés de s'arrêter de travailler et ne sont pas reconnus comme des victimes d'une maladie professionnelle. Toutes et tous ont été invisibilisés et ignorés par les pouvoirs publics. Bien au-delà, toute personne atteinte de ces séquelles ou empêchée de travailler doit bénéficier d'un suivi médical complet, du remboursement intégral de ses frais de santé, de l'aménagement de son poste de travail, voire d'une reconnaissance d'affection de longue durée. À défaut d'une révision du décret pris par le ministre le 14 septembre, et sans rien enlever de la nécessité de la reconnaissance de la maladie professionnelle quand c'est le cas, la proposition de loi pourrait répondre à l'ensemble des situations des nombreuses personnes atteintes d'un covid long.

Notre groupe a déjà demandé à plusieurs reprises à ce que cesse l'errance médicale des malades au long cours de la covid-19. Nous voulons que ces malades soient reconnus et bénéficient d'une prise en charge intégrale. Nous soutenons donc la proposition qui prévoit que les malades obtiennent une réparation intégrale des séquelles temporaires ou définitives du fait de leur infection au virus, par la création d'un fonds d'indemnisation des victimes de la covid-19, placé sous la tutelle des ministères de la sécurité sociale et du budget. Certes, la possibilité d'indemnisation rapide ne rendra pas aux malades la santé, ni la possibilité de travailler, mais elle est au moins un signe de la prise de responsabilité collective de la société face à cette tragédie et leur permettra de continuer une vie digne. Nous voterons bien évidemment en faveur de la proposition de loi.

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