La covid-19 et ses conséquences sur la santé sont devenues, à juste titre, un sujet de préoccupation majeure pour nos concitoyennes et nos concitoyens, une véritable question de santé publique. De nombreux salariés en ont été victimes sur le lieu d'exercice de leur profession : les personnels soignants, les pompiers, les agents de la voirie, des ordures ménagères, les salariés des grandes surfaces, ceux des centres logistiques, et bien d'autres encore. On leur a rendu hommage, car ils et elles ont continué à travailler pour être au plus près de la population et assurer un service de proximité.
Selon les données de Santé publique France, au 14 janvier, plus de 64 000 professionnels en établissement de santé ont été infectés par le virus depuis le mois de mars 2020. Certains ont même perdu la vie. Cette situation est d'autant plus injuste que les modes de transmission sont connus. Les mesures de précaution n'ont été pleinement appliquées, ni au personnel soignant, ni aux salariés des secteurs public et privé. Tous ont souffert d'un manque criant de matériel de protection – masques, gel hydroalcoolique, surblouses, charlottes – , avec des conséquences dramatiques pour certains. Nous avons entendu la colère des salariés confrontés au risque d'infection, et leur peur de transmettre le virus à leurs proches en rentrant chez eux. Nous les avons vus nombreux rester sur leur lieu de travail ou ne pas rentrer à leur domicile pour éviter la transmission.
Les premières mesures prises par le Gouvernement sont loin d'être satisfaisantes. Le décret paru le 14 septembre limite la portée de la reconnaissance en maladie professionnelle aux seuls personnels hospitaliers gravement atteints, et instaure des conditions draconiennes. Il en exclut par ailleurs tous les autres salariés.
Toutes les travailleuses et tous les travailleurs qui ont contracté la maladie au travail, ou en s'y rendant, doivent bénéficier automatiquement d'une juste réparation, quel que soit leur métier. L'expérience dans ce domaine ne nous est pas inconnue. Les maladies professionnelles telles que l'amiante sont souvent sous-déclarées, sous-évaluées, sous-reconnues. Il ne s'agit pas de reproduire les mêmes méfaits avec la covid-19. Comme mon collègue Pierre Dharréville l'a souligné lors du débat sur la proposition de loi pour renforcer la prévention en santé au travail, promouvoir la santé au travail est un objectif crucial ; pour l'atteindre, la puissance publique doit insuffler un nouvel élan.
La proposition de loi qui nous est soumise vise à reconnaître la covid-19 comme maladie professionnelle ; tous les salariés peuvent prétendre à la reconnaissance, quels que soient leurs symptômes. Elle constitue donc une avancée. Pour ces raisons, je souligne la qualité du travail réalisé par Régis Juanico, qui entend avec cette proposition de loi apporter les réponses les plus justes.
La première suppose la prise en considération de l'ensemble des préjudices subis par les salariés. Il est aujourd'hui reconnu que différents symptômes, qui ne sont pas seulement pulmonaires, persistent des semaines, voire des mois après la déclaration de la maladie. Il est donc juste et légitime de les reconnaître. Qu'ils appartiennent au secteur public ou au secteur privé, les salariés ont droit à réparation. Cela commence par la reconnaissance.
Le texte crée un fonds d'indemnisation pour l'ensemble des salariés. Il s'inspire des fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante et des pesticides pour instaurer celui dédié aux victimes de la covid-19. L'ambition est de le faire fonctionner comme un guichet unique, pour simplifier les procédures des salariés victimes et leur éviter des démarches souvent trop longues et trop complexes.
Le financement par la branche accidents du travail et maladies professionnelles – AT-MP – est la décision la plus opportune. C'est d'autant plus juste que la branche AT-MP, financée par les employeurs, connaît depuis plusieurs années un excédent qui s'élève à plus de 1 milliard d'euros, alors que des milliers de salariés sont victimes de maladies professionnelles. Il s'explique par les absences de prise en considération de nouvelles pathologies liées au travail, mais aussi par les sous-déclarations des accidents du travail et des maladies professionnelles. Le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante – FIVA – est financé par la branche AT-MP, donc par les entreprises ; le versement de l'État est réduit chaque année, ce que nous déplorons à chaque examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Une remobilisation est donc urgente.
L'enjeu, désormais, est de prévenir, afin que plus aucun salarié ne soit infecté sur son lieu de travail. Il est par conséquent crucial de développer la culture de prévention dans l'entreprise, en associant les salariés et leurs représentants. Cette proposition de loi, bien que perfectible, va dans le bon sens : le groupe de la Gauche démocrate et républicaine la soutient.